Sorti en 2015, le film The Big Short narre l'histoire d'une poignée d'outsiders qui, en anticipant la crise financière de 2008 et en pariant contre les banques, ont amassé d'amples fortunes.
Si le film devait aujourd'hui avoir une suite, ses protagonistes seraient un groupe d'investisseurs et d'investisseuses pariant cette fois sur la crise des centres commerciaux, surnommée retail apocalypse. Affaiblis par la croissance du e-commerce, les évolutions démographiques et, bien sûr, la pandémie de Covid-19, les magasins physiques sont en grande difficulté.
Le célèbre investisseur américain Carl Icahn a senti la bonne affaire: il s'est mis dès mi-2019 à shorter les valeurs liées aux centres commerciaux et a ainsi augmenté sa fortune de 1,3 milliard de dollars [1,1 milliard d'euros] lors des six premiers mois de l'année en cours.
Alors que la plupart des investissements consistent à acheter des actions en pariant sur leur hausse, d'autres font le pari inverse et préfèrent spéculer sur leur chute. C'est une technique appellée short selling ou vente à découvert: on vend un actif non possédé afin de le racheter plus tard, à un prix inférieur. Précisément ce qu'Icahn a fait dans le secteur du retail.
Tempête en vue
L'Américain a ainsi commencé à parier contre CMBX 6, un indice très exposé aux prêts des galeries marchandes. La pandémie a fait le reste: les défauts de paiement ont entraîné la fermeture de nombreux magasins dans les célèbres malls, et c'est tout un système qui s'est un peu plus approché de l'effondrement.
Carl Icahn ne serait par ailleurs pas le seul à avoir flairé le bon coup. Interrogé par le New York Times, Scott Burg de Deer Park Road, un important gestionnaire de hedge funds, note que les parallèles sont nombreux entre les shorters de centres commerciaux en 2020 et les personnes ayant parié sur la crise des subprimes en 2008.
D'un côté, il y aurait de fortes similitudes entre la façon laxiste dont les prêts immobiliers ont été attribués avant 2008 et ceux accordés plus récemment aux commerces des galeries marchandes.
De l'autre, il y aurait selon Burg beaucoup trop de centres commerciaux sur le sol américain, la correction étant devenue inévitable avant même la pandémie. «C'est une tempête absolument parfaite, malheureusement, pour le marché de l'immobilier commercial», résume-t-il dans le média new-yorkais.