C'est la goutte de brut qui fait déborder le baril. Le secteur pétrolier, qui vit sa pire année depuis très longtemps, fait désormais face à une menace accrue de la part des pirates, en particulier dans le golfe de Guinée.
Selon le Bureau maritime international, la piraterie est en hausse de 24% dans le monde, avec un total de 47 attaques au premier trimestre 2020, contre 38 l'an dernier à la même période.
Bordé par huit pays africains producteurs, le golfe de Guinée est une région cruciale pour le marché mondial de l'or noir. Cruciale mais dangereuse: on y dénombre déjà 21 attaques depuis janvier. En 2019, elle représentait 90% des kidnappings en mer.
La plupart des abordages ont lieu dans les eaux territoriales du Nigeria. Mais selon la société de conseil en gestion des risques Verisk Maplecroft, la piraterie devrait continuer à se développer et se propager à d'autres pays.
Le nombre d'équipages kidnappés dans le golfe de Guinée est passé de 78 il y a deux ans à 121 l'an passé, soit une hausse de plus de 50%. La région est devenue l'épicentre mondial de la piraterie, surpassant par exemple le détroit de Malacca en Asie du Sud-Est.
L'essor du kidnapping
Depuis la baisse des cours du brut en 2015, les pirates se sont détournés des cargaisons des navires et ont développé les enlèvements contre rançons.
Les analystes spécialisé·es sont pessimistes: les navires pétroliers ne peuvent compter ni sur une aide internationale, ni sur les forces de sécurité locales, plutôt inefficaces. Par ailleurs, les pirates nigérians ont souvent acquis de l'expérience de combat aux côtés des sécessionistes du delta du Niger.
L'absence de partage des revenus du pétrole au Nigeria facilite leur recrutement. Enfin, le paiement de nombreuses rançons les motive à étendre leur zone d'influence, pour capturer des cibles de plus haute valeur.
«Les transporteurs régionaux et les exploitants de pétrole et de gaz doivent s'attendre à de nouvelles perturbations des chaînes d'approvisionnement, des routes d'exportation et à une augmentation des coûts, car davantage de paiements de rançons seront nécessaires pour libérer les équipages», analyse froidement Verisk Maplecroft.
Les pétroliers actuellement réquisitionnés pour stocker les surplus de pétrole en pleine mer constituent des cibles idéales.