Le confinement à l'échelle mondiale a perturbé et désorganisé la machine bien huilée qu'est habituellement l'industrie agroalimentaire globale. Cette situation, associée aux risques de seconde vague, inquiètent la Chine, qui dépend de ses imports.
Le ministère du Commerce chinois se prépare à toutes les éventualités et a demandé aux producteurs agroalimentaires ainsi qu'aux négociants en grain d'accélérer les achats et la production de maïs, de soja et d'huile afin d'augmenter les stocks du pays.
«Il y a des risques d'obstacles sur la chaîne d'approvisionnement, explique un trader en contact avec les autorités, par exemple si un port exportateur est obligé de fermer.» Le gouvernement semble particulièrement inquiet de la situation en Amérique du sud.
«Ils nous ont demandé d'augmenter les stocks, de conserver un niveau de provisions plus élevé que d'habitude», poursuit le trader interrogé par Reuters. «Le Brésil ne semble pas dans une position favorable», ajoute-t-il, le pays dirigé par Jair Bolsonaro étant le principal fournisseur de soja du pays.
En mars et avril, des exports de soja brésilien ont été repoussés dans le temps, à cause d'un manque de main-d'œuvre dû à la crise du Covid-19 ainsi qu'à des chutes de pluie importantes.
Danger pour le régime
Des cargos de grains sont aussi acheminés depuis les États-Unis, l'accord commercial signé en janvier prévoyant que Pékin augmente ses importations de produits agricoles américains.
Des achats de viande, en particulier de porc dont les cheptels chinois ont été décimés par la grippe porcine en début d'année, devraient suivre. Mais l'épidémie a considérablement ralenti l'activité des abattoirs américains, où des clusters se sont développés.
Les enjeux sont lourds pour Xi Jinping, qui doit à tout prix éviter une nouvelle crise. Avant le coronavirus, la crise porcine, qui a mis en péril la principale source de protéines du pays, était déjà un motif d'inquiétude majeur pour le pouvoir central.
La gestion du Covid-19 à son apparition a entraîné d'autres motifs profonds de mécontentement populaire, qu'une censure sans pitié s'attelle à museler et contenir.
À la colère notamment provoquée par l'arrestation d'un médecin lanceur d'alerte s'ajoute désormais le chômage, qui atteint des sommets inédits dans l'histoire moderne du pays.
Or, l'augmentation globale du niveau de vie ces dernières années est l'un des critères qui assoit la légitimité de Xi Jinping. Une pénurie alimentaire aujourd'hui serait une catastrophe de plus à gérer pour l'inflexible président de la République populaire de Chine.