La pomme française est en plein marasme. La récolte s'établit cette année à 1,36 million de tonnes, un chiffre en baisse de 18% par rapport à l'an passé et le deuxième plus bas historique de la décennie, selon l'Association nationale pommes poires.
La baisse dépasse même 30% pour la variété Golden, la plus importante pour la fabrication de compote. En cause: la météo catastrophique, avec une vague de froid et une canicule tardive.
En conséquence, le prix des pommes flambe, et particulièrement celui des variétés destinées à la compote. Car paradoxalement, les pommes sont plutôt de bonne qualité, ce qui induit une situation positive pour les pommes fraîches aux dépens de celles dédiées à la compote. En moyenne, le cours des Golden est en hausse de 60% et celui des pommes bicolores de 50%, si on compare les mois d'octobre 2020 et 2019.
Ces hausses de prix tombent au plus mauvais moment, alors que s'ouvrent les négociations commerciales entre fabricants de compotes et distributeurs.
Guerre des gourdes
Les producteurs de pommes membres de l'Afidem (Association française interprofessionnelle des fruits et légumes) appellent les distributeurs à étendre les partenariats de prix, développés pour les pommes de table dans le cadre des États généraux de l'alimentation, aux produits transformés à base de pommes.
L'Association nationale pommes poires milite quant à elle pour un étiquetage de la provenance des produits transformés, afin de préserver la pomme française des importations à bas coût –la Pologne pratique par exemple des prix nettement inférieurs en raison des coûts de la main-d'œuvre, souvent ukrainienne.
Un pomme sur cinq finit en compote en France, rappellent Les Échos. Les fruits servant à la fabrication de compote sont souvent ceux présentant un mauvais calibre ou d'un critère visuel défaillant. «La compote est un moyen de lutter contre le gaspillage», souligne Josselin Saint-Raymond, directeur de l'Association nationale pommes poires.
Une revalorisation des prix serait quasi indolore pour le consommateur, une hausse de 50% de la matière première se traduisant par à peine 1 ou 2 centimes supplémentaire par pot ou par gourde. Ce marché à 1 milliard d'euros est en croissance régulière, à la différence de celui des pommes fraîches, et soutient donc toute la filière.
Les fabricants de compote auront pourtant du mal à faire pleurer dans les chaumières. En 2019, six d'entre eux avaient écopé d'une amende de 58,3 millions d'euros pour entente sur les prix. Voilà qu'aujourd'hui ce «cartel de la compote» se retrouve en position de faiblesse: la guerre des petits pots n'a pas fini de faire rage.