Mercredi 14 avril, Coinbase, l'une des plus grandes plateformes d'échange de cryptomonnaies, a effectué une introduction en bourse fracassante. Surfant sur l'extraordinaire succès du bitcoin pendant l'année écoulée, la plateforme a battu le record de valorisation accordée à une entreprise tech lors de sa première journée: 86 milliards de dollars (environ 71 milliards d'euros).
Une semaine avant, raconte le New York Times, l'entreprise a franchi une étape moins clinquante, mais tout aussi importante: sa grande entrée à Washington. Ses lobbyistes ont officiellement commencé à se mettre au travail afin de défendre les intérêts des cryptos auprès du gouvernement et des parlementaires.
Car si avoir battu un record en bourse précédemment détenu par Facebook lors de son IPO en 2012 est de bon augure pour l'entreprise, la comparaison pourrait jouer en sa défaveur. Les enquêtes en cours montrent que le Congrès américain se mord les doigts de ne pas avoir contrôlé davantage ce réseau social qu'il comprenait mal il y a dix ans. Il ne veut pas commettre les mêmes erreurs aujourd'hui.
Le Crypto Council for Innovation (CCI), cofondé par Coinbase, va donc avoir du pain sur la planche. Tout d'abord, il lui faudra soigner la réputation des cryptomonnaies. La première publication du groupe nouvellement créé porte sur l'utilisation illicite du bitcoin, qu'il juge évidemment «largement surévaluée».
Contrairement à l'image anti-establishment que les partisans des cryptos se donnent volontiers, le CCI ne veut surtout pas présenter la technologie comme un bouleversement financier, afin d'éviter à tout prix des régulations spécifiques.
Disruption docile
Le PDG de Coinbase, Brian Armstrong, souhaite même démontrer que les cryptomonnaies et leur écosystème accueillent docilement l'attention des autorités. «Nous sommes très excités et heureux de jouer selon les règles, affirme-t-il à CNBC, mais nous demandons que cela se passe sur un terrain à égalité avec les services financiers traditionnels.»
Pour amadouer les responsables politiques, l'industrie des cryptomonnaies rassure donc d'une main, mais agite de l'autre l'épouvantail de la Chine. Il ne faudrait tout de même pas que des régulations ralentissent le développement des cryptos alors que Pékin expérimente déjà une monnaie numérique.
Autre chantier important qui attend ces lobbyistes: les chutes fréquentes et emballements intempestifs des cours n'ont rien pour rassurer les parlementaires, qui voient cette technologie comme un risque dont ils ont du mal à saisir les avantages. C'est donc le moment pour l'industrie de dissiper ce flou. En tout cas, sur ses avantages.