Vous les avez déjà sûrement vus dans les rues: les vélos cargos, allongés d'un casier à l'avant ou à l'arrière et permettant de transporter des charges de plusieurs dizaines de kilos, se frayent une place de plus en plus importante en ville.
Avec des cargaisons parfois inattendues. Depuis 2015, la société Saunier Duval propose ainsi à ses clients en panne de chaudière de leur livrer un nouvel appareil en moins de deux heures à vélo!
À Strasbourg, six tonnes de pavés pour un chantier ont été livrées par vélo cargo à assistance électrique, là où huit camionnettes auraient été nécessaires. Monoprix a lui aussi remplacé toutes ses camionnettes par des vélos cargos à Paris.
En mai dernier, en visite à la plateforme de livraison à vélo Synchronicity à Marseille, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, a présenté un «plan cyclo-logistique» pour booster le vélo cargo, avec 12 millions d'euros d'argent public à la clé.
«Les commandes internet, ce ne sont pas qu'un clic. Derrière, il y a toute une chaîne; or, les livraisons représentent 25% des déplacements carbonés dans les centres-villes, et 30% des émissions de gaz à effets de serre. Il faut tailler dans le gras et vite», plaide dans Le Parisien Maxime Ducoulombier, cofondateur de Synchronicity.
Pédaler vers le futur
Selon une récente étude londonienne de l'Active Travel Academy, la livraison par vélo cargo est en moyenne 1,61 fois plus rapide que par camionnette, et réduit les émissions de CO2 de 30% par rapport à une voiture électrique et de 90% par rapport à un véhicule diesel.
Si 10% des livraisons étaient effectuées par vélo, on gagnerait aussi 384.000 mètres carrés d'espace public dédié aux places de stationnement, et 16.980 heures de temps perdu dans les embouteillages. Plus rapide, le vélo-cargo permet de livrer sept colis par heure, contre quatre pour une camionnette.
Afin d'amorcer la pompe, le plan de Barbara Pompili prévoit notamment une subvention pour chaque colis livré à vélo, à l'instar du «coup de pouce vélo réparation», une ristourne de 50 euros accordée aux particuliers pour faire réparer leur vieux vélo.
L'idée est aussi de mieux faire passer la pilule des zones à faible émission (ZFE), qui ont fleuri un peu partout dans les villes et font grincer des dents les professionnels qui ne peuvent plus entrer dans le centre.
Du coup, et malgré un prix pouvant atteindre 6.000 euros, les ventes explosent. Selon Union Sport et Cycles, les ventes ont plus que triplé (+354%) en France en 2020. Au niveau mondial, elles devraient dépasser les 900 millions de dollars cette année, 43% provenant des ventes aux entreprises, selon un rapport cité par CityLab.
En Allemagne, la Deutsche Post détient aujourd'hui une flotte de 17.000 vélos et tricycles. «Le changement dans les cinq dernières années a été extraordinaire», confirme Kevin Mayne, directeur du Cycling Industries Europe, un groupement professionnel.
Les États-Unis restent pour l'instant étrangement sur le bord de la route. À Miami, l'initiative lancée par DHL s'est limitée à… quatre vélos, et à New York, Amazon peine à étendre sa flotte.
Contrairement à leurs cousines européennes, les villes américaines imposent beaucoup moins de restrictions de circulation et possèdent moins de pistes cyclables. De plus, les logiciels d'optimisation de livraison sont calibrés pour les camionnettes. Toute une culture à revoir.