Il y a six ans déjà, le fabricant de textile Shandong Ruyi Technology Group se lançait à la conquête des marchés internationaux de produits de luxe. À sa tête, l'homme d'affaires Qiu Yafu était prêt à tout pour faire de son empire une deuxième version du géant français LVMH, à qui il semble vouer une admiration sans limite.
Le groupe avait notamment acquis les marques française Maje et Sandro, ainsi que la marque anglaise Aquascutum. Mais il se retrouve aujourd'hui au centre d'une joyeuse pagaille incluant quelques-unes des plus grandes institutions financières du monde, selon le magazine Bloomberg. De fait, le groupe a perdu des entreprises clés et est en litige avec certains de ses investisseurs, tels que Carlyle Group.
À son apogée, pourtant, Shandong Ruyi a bénéficié de plusieurs milliards de dollars de la part d'investisseurs et fonds chinois, lorsque les autorités du pays ont décidé d'encourager les entreprises traditionnelles à construire une économie basée sur la consommation.
Seulement, il semble que cela n'ait pas été bénéfique au géant du luxe. Selon Jeffrey Wang, codirecteur du bureau de Shanghai de la banque d'investissement BDA partners, «la plupart des acquisitions faites par les entreprises chinoises à l'étranger ces dernières années n'ont pas été couronnées de succès. Maintenant, ils ne peuvent pas se permettre de vendre ces actifs à perte».
À 64 ans, Qiu Yafu serait, selon des sources proches, dans une chambre d'hôtel à Hong Kong depuis plusieurs mois, afin de négocier et d'essayer de sauver les restes de son empire international.
Ascension, gloire et chute
Sur le papier, la stratégie de Shandong Ruyi n'était pourtant pas mauvaise. Alors que la demande de produits de luxe étrangers augmentait en Chine, le groupe s'est emparé de marques qui avaient négligé le marché de l'empire du Milieu, afin de les rapprocher de l'endroit où se trouvait cette nouvelle demande à forte croissance.
En 2016, après être devenu actionnaire majoritaire du groupe de mode français SMCP SA, il a aidé à construire un réseau de plus de cent magasins dans les centres commerciaux de villes en plein essor, telles que Shanghai et Pékin.
C'est deux ans après, en 2018, que Qiu Yafu a déclaré publiquement vouloir faire de Shandong Ruyi le LVMH chinois et mettre fin à l'image d'une industrie chinoise productrice massive de produits de piètre qualité.
Selon l'un de ses représentants, plusieurs facteurs ont mené le groupe sur cette pente. «Nous n'avons pas fait d'acquisitions inutiles juste pour le plaisir de gagner des trophées, explique-t-il. C'est juste très malheureux que la pandémie de Covid-19, couplée aux tensions sino-américaines et à un environnement de crédit resserré aient fini par nous mettre dans cette situation.»
Désormais, Shandong Ruyi doit donc se concentrer sur le désendettement, en comptant notamment sur les fonds internationaux enclins à racheter des actifs précieux.