Après l'attaque par drones de deux des plus grandes installations pétrolières d'Arabie Saoudite le 14 septembre dernier, les marchés importateurs d'or noir sont dans l'expectative. La production mondiale a brutalement chuté de 5 % et le Moyen-Orient n'est pas à l'abri d'une nouvelle guerre, puisque les États-Unis ont rapidement incriminé l'Iran.
L'Asie est particulièrement vulnérable aux tensions géopolitiques dans la région. D'après le cabinet de recherche et consulting en énergies Wood Mackenzie, le continent importe depuis l'Arabie Saoudite environ cinq millions de barils par jour, soit 72 % des exportations de pétrole brut du pays.
Front commun
Habituellement rivales, les économies les plus importantes du continent –la Chine, l'Inde, le Japon et la Corée du Sud– ont parlé d'une même voix pour appeler au calme. Alors que ces États ont des positions diplomatiques parfois opposées vis-à-vis des États-Unis, aucun ne semble goûter les tweets va-t-en-guerre de Donald Trump.
De toutes les nations asiatiques, l'Inde est peut-être celle qui a le plus à craindre d'une escalade. Le pays est en pleine crise économique; la croissance indienne est à son niveau le plus bas depuis mars 2013.
Si l'Inde se plie au boycott de l'Iran imposé par les États-Unis, la République islamique n'est pas si éloignée de ses côtes: elle aurait tout intérêt à une résolution rapide et pacifique du conflit.
Le Japon, pour sa part, est plus mesuré que son allié américain quant à la situation entre Riyad et Téhéran. En août, le Premier ministre Shinzo Abe a notamment refusé d'envoyer des militaires dans le détroit d'Ormuz, malgré les demandes pressantes des États-Unis.
Le pays a officiellement dénoncé des «attaques terroristes», tout en prenant soin de rappeler qu'«un afflux stable de pétrole venant du Moyen-Orient est indispensable pour la stabilité et la prospérité de l'économie globale, Japon compris».
Stratégie chinoise
En conflit ouvert avec les États-Unis, la Chine a exprimé le même sentiment –en prenant moins de pincettes. Hua Chunying, la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a estimé le 16 septembre qu'il était «irresponsable» d'agir avant les résultats d'une enquête et que la Chine «s'opposait à toute action qui intensifierait le conflit».
Selon Alexander Neill, un analyste de l'Institut international d'études stratégiques de Singapour interrogé par Bloomberg, le climat d'incertitude pourrait servir la Chine en affaiblissant les relations entre ses voisins et son rival américain.
«La Chine va argumenter que les États-Unis sont un allié inconstant et trop peu fiable, capable de déclencher des troubles dans une région stratégique», expose-t-il, et qu'il vaut mieux suivre son exemple en construisant des infrastructures à travers le monde, afin de se ravitailler soi-même et ne plus dépendre de l'oncle Sam.