Chercher sa petite monnaie dans les tréfonds d'une bourse elle-même perdue dans le chaos d'un sac pour payer son latte du matin peut être pénible.
Starbucks a trouvé la solution pour aider ses client·es à régler leurs commandes rapidement et sans prise de tête: leur vendre des cartes de paiement rechargeables. Discrètement, la chaîne a en parallèle réussi un joli coup financier, comme l'explique le blogueur économique JP Koning.
Dans les résultats financiers de l'entreprise pour 2018, un détail l'intrigue: Starbucks indique un passif de 1,6 milliard de dollars [1,44 milliard d'euros] correspondant à la somme totale dont sa clientèle dispose sur les fameuses cartes.
Wow Starbucks, what a great gig.
— JP Koning (@jp_koning) August 11, 2019
Starbucks has ~$1.6 billion in 'stored value card liabilities' i.e. the Starbucks Card. So ~6% of the firm's liabilities are comprised of coffee addicts paying 0% for the privilege of lending to their supplier.
Source: https://t.co/nGH2arujYz pic.twitter.com/cGcSW3L4MM
D'une pierre deux coups
Techniquement, cette somme est immédiatement exigible, mais évidemment, elle n'est pas immédiatement exigée. JP Koning en conclut que Starbucks emprunte de l'argent à ses client·es sans devoir leur verser le moindre intérêt, comme le ferait une banque dans le cas de comptes courants non rémunérés.
Plus fort encore: Starbucks a déclaré que 155 millions de dollars de crédits n'avaient pas été utilisés par les personnes encartées en 2018 –une somme définitivement perdue pour elles, qui tombe dans l'escarcelle déjà bien garnie de l'entreprise. Koning calcule que Starbucks emprunte non pas à taux zéro, mais à un taux négatif approchant les -10%.
Un parallèle est tracé avec PayPal, qui détient également les sommes que les internautes déposent sur la plateforme de paiement avant de les dépenser, soit 20 milliards de dollars [18 milliards d'euros].
PayPal a néanmoins l'obligation légale de conserver une partie de ces fonds sur un compte bancaire spécifique ou d'investir dans des obligations étatiques à faible rendement.
Starbucks, de son côté, peut disposer de ces 1,6 milliard de dollars de trésorerie comme elle l'entend. Sa seule obligation consiste à fournir du café, de la chantilly et divers coulis à ses habitué·es pour s'acquitter de sa dette –pas grand-chose, finalement.
À ce petit jeu, l'entreprise de Seattle semble être championne. Le mastodonde de la distribution Walmart, qui applique une astuce équivalente, ne déclare que 1,9 milliard de dollars de passif lié aux cartes de sa clientèle, malgré des ventes annuelles vingt fois supérieures à celles de Starbucks.