En lisant ceci, peut-être vous détendez-vous dans le confort de votre bureau personnel, isolé du reste du monde. Peut-être vous trouvez-vous au beau milieu de la masse de vos collègues, dans un open space. Ou peut-être êtes-vous l'une de ces têtes semi-anonymes dépassant à grand peine de la cloison de votre cubicle.
À chaque génération son aménagement de l'espace de travail. Au début du XXe siècle, les open spaces étaient constitués de rangées de bureaux individuels, inspirés du taylorisme en vogue dans les chaînes d'assemblage des usines américaines. En hauteur, les contremaîtres surveillaient leurs petites mains, les regardant travailler comme on inspecte les rouages d'une machine.
Après la Seconde Guerre mondiale, un modèle de bureau allemand s'est imposé. Le Bürolandschaft, ou «paysage de bureau», prenait toujours place dans un espace ouvert, mais les bureaux se détachaient du sytème rigide de rangées pour former des modules hétérogènes. Cette fois, les responsables intégraient ce plan de table pour se mettre au niveau de leur personnel.
Open space pas si ouvert que cela
Dans les années 1960, la société Herman Miller dévoile son «Action office» –ou cubicle, pour reprendre l'expression courante en anglais. Ce bureau individuel est cloisonné grâce à une petite paroi sur trois côtés, pour offrir un espace semi-privatif en étant assis, tout en restant ouvert sur l'environnement de travail. Pensé pour être modulable, le cubicle a été détourné de son utilisation première pour revenir au système en grille.
La vision de l'espace de travail par Jacques Tati, dans Playtime
Une équipe de recherche de l'Université Harvard a étudié, au sein d'une entreprise du classement Fortune 500, les effets du travail en open space sur la productivité. Dans son étude publiée en juillet 2018, on apprend qu'avec ce type d'agencement, les interactions entre collègues chutent de six à deux heures par jour par rapport à un bureau fermé. Les échanges par e-mail ont quant à eux bondi de 67%, et ceux par messages instantanés de 75%.
Jusqu'à ce jour, aucune disposition de bureau n'a fait l'unanimité –tantôt trop intrusive, tantôt critiquée pour son impact négatif sur la productivité. Attendons de voir ce que la prochaine génération nous réserve.