Pour limiter la hausse de la température moyenne mondiale à 1,5°C, l'ONU estime qu'il faut réduire la production de charbon de 11% par an jusqu'en 2030.
Dans son dernier rapport publié fin mai, l'Agence internationale de l'énergie appelait elle aussi à «cesser immédiatement d'investir dans les énergies fossiles». Dans la réalité, les pays du G20 n'ont pas vraiment l'intention de se priver de cette énergie bon marché et facilement disponible.
Le think tank Global Energy Monitor a ainsi répertorié 432 nouveaux projets de mines de charbon dans le monde, avec une capacité de production cumulée de 2,28 milliards de tonnes. De quoi augmenter la production de 30% par rapport au niveau actuel, et entraîner des émissions de CO2 équivalentes à celles des États-Unis, alerte l'ONG américaine.
La Chine, l'Inde, l'Australie et la Russie représentent à elles seules 77% des tous les projets miniers. Mais si la Chine produit majoritairement pour sa propre consommation, l'Australie, l'Indonésie et la Russie vont eux polluer… ailleurs.
Une analyse indépendante du think tank Ember estime que les deux premiers représentent 59% des exportations de charbon dans le monde, qui se sont élevées à 1,25 milliards de tonnes en 2020. Au total, ces exportations génèrent 3,4 millions de tonnes de CO2 par an, soit 10% des émissions liée à l'énergie.
Manne crasseuse
Car si du côté des consommateurs, de gros efforts ont été engagés, «il y a eu jusqu'ici peu d'accords contraignants concernant l'offre au niveau mondial», déplore Nicolas Fulghum, analyste chez Ember.
Et pour cause: le charbon représente le premier poste d'exportation de l'Australie, qui en a tiré près de 55 millions de dollars australiens en 2020 (35 millions d'euros).
Une manne dont ces pays n'ont aucune envie de se priver. Selon Bloomberg, la Russie va ainsi investir 8,2 milliards d'euros dans la modernisation de ses chemins de fer destinés à stimuler les exportations des charbon vers l'Asie.
«Le gouvernement [de Poutine] fait le pari que la consommation de charbon continuera d'augmenter sur les grands marchés asiatiques comme la Chine, même si elle se tarit ailleurs», explique Bloomberg.
La rénovation du Transsibérien et la ligne Baïkal-Amour, qui relie l'ouest de la Russie à l'océan Pacifique, porteront la capacité de transport de charbon à 144 millions de tonnes par an d'ici 2024.
Le pire n'est cependant pas certain. «Les trois quarts des projets de mines en sont encore au stade préliminaire et sont donc susceptibles d'être annulés», tempère Global Energy Monitor dans son rapport.
Pour Ryan Driskell Tate, principal auteur du rapport, le pari des pays exportateurs est même assez risqué. «La demande en charbon chute et le financement des nouveaux projets s'assèche. Les nouvelles capacités arriveront dans un monde où le charbon est non viable économiquement et intenable pour l'environnement.»
La Chine a ainsi promis de faire passer la part du charbon dans la production énergétique à 14,6% d'ici 2030, contre 49% aujourd'hui. Le pari sera-t-il tenu?