De zéro à beaucoup de zéros. | David McNew / Getty Images North America / AFP
De zéro à beaucoup de zéros. | David McNew / Getty Images North America / AFP

Mauvaise nouvelle: le pétrole génère un «tsunami de cash» pour ses producteurs

On le croyait mort, il n'a jamais été si profitable.

C'était il y a à peine deux ans, en pleine pandémie, alors qu'un autre monde en rupture définitive avec celui d'avant le Covid-19 semblait se dessiner: dans une tempête de marché sans précédent, le prix du pétrole américain passait sous la barre étonnante de zéro dollar.

Les nations confinées et la demande mondiale en berne, le brut se noyait dans sa propre production, certains cherchaient à le remettre sous la terre dont il avait été extrait faute d'espaces de stockage, des tankers aux ventres débordant d'un or noir devenu indésirable faisaient des ronds dans l'eau en attendant que des réservoirs se libèrent à terre.

Bref, le monde à l'envers, et peut-être le début d'une bonne nouvelle pour la planète, qui pouvait accélérer sa transition vers des énergies plus propres.

Avance rapide: deux ans plus tard, la tendance s'est totalement inversée, comme vous n'aurez pas manqué de le remarquer si vous devez régulièrement faire le plein de votre véhicule.

Pour les producteurs américains, l'invasion de l'Ukraine par la Russie, qui a démultiplié les tensions d'un marché en surchauffe dont l'inflation a poussé les grandes nations à taper dans leurs réserves stratégiques, est la meilleure nouvelle depuis vingt-cinq ans.

Ces compagnies aux endettements historiquement légendaires, au bord de la faillite il y a deux ans quand elles ne se sont pas mises sous le régime américain de la banqueroute à l'image de Chesapeake Energy, font désormais face à un «tsunami de cash», pour reprendre les termes d'un analyste interrogé par le Financial Times.

Aux prix actuels, les producteurs américains de pétrole et de gaz de schiste pourraient ainsi dégager un profit net ahurissant de 180 milliards de dollars pour la seule année 2022 –plus que les vingt années précédentes combinées.

C'est suffisant pour effacer des années de dette et verser de copieux dividendes aux actionnaires restés dans ce navire autrefois en perdition. Ce pourrait même être suffisant pour que certaines de ces compagnies bénéficient des fonds nécessaires à les privatiser complètement, grâce à des rachats d'actions massifs les faisant sortir des marchés boursiers.

Bingoil

Mais la fête n'est pas qu'américaine. Le Qatar notamment profite de la crise pour sortir un peu plus de l'ombre et vendre des quantités astronomiques de gaz à des pays cherchant à se défaire de leur dépendance russe –au prix d'un coût important, là aussi, pour l'environnement. Quant à Aramco, le groupe pétrolier saoudien, il a affiché des résultats record et est désormais la première entreprise du monde en capitalisation boursière, devant Apple.

À l'est aussi, des mains se frottent. Un éventuel embargo sur le pétrole russe peine à être décidé en Europe, qui par ailleurs a décidé de se plier aux desiderata de Moscou en autorisant du bout des lèvres ses firmes à payer leur gaz en roubles.

Pendant ce temps, en trouvant de nouveaux clients ravis des rabais obtenus, comme l'Inde ou la Chine, la Russie engrange grâce à son seul secteur de l'énergie des revenus monstres. La balance commerciale du pays a ainsi grimpé à 96 milliards de dollars pour les quatre premiers mois de l'année 2022, établissant un record depuis 1994, comme le note Bloomberg.

Ces sommes folles permettent, en partie et temporairement du moins, à l'économie russe de tenir le choc des sanctions, au rouble de se remettre de son effondrement. Mais elles permettent surtout au régime de Vladimir Poutine de continuer à financer sa guerre en Ukraine, que d'autres sanctions de type technologique pourraient heureusement freiner.

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