Cinq milliards de dollars, soit 4,25 milliards d'euros: c'est, comme l'explique Wired, l'estimation du coût pour l'économie mondiale de l'éruption de l'Eyjafjallajökull islandais en 2010. Une paille, malgré les sérieuses perturbations qu'elle a provoqué à l'époque. Selon les estimations du FMI, l'actuelle pandémie de Covid-19 pourrait représenter pour l'économie mondiale un coût faramineux de 22.000 milliards de dollars.
Pourtant, comme le note également Wired, l'éruption de l'Eyjafjallajökull fut considérée comme «modérée» par la communauté des volcanologues, avec une puissance notée à 4 sur l'Indice d'explosivité volcanique.
À titre de comparaison, l'éruption du Mont Tambora indonésien en 1815 fut notée à 7. Elle fut à l'origine de tels rejets atmosphériques que l'humanité put noter une nette baisse globale des températures. Ce fut l'année sans été de 1816, dont l'explosion du Tambora ne fut certes pas le seul déclencheur, qui à son tour déboucha sur des récoltes perdues, des migrations massives, des famines et des troubles publics.
Or, si l'économie était déjà largement globalisée en 1815, elle l'est totalement en 2021, somme infinie de mécanismes interdépendants –la disruption du blocage du Canal de Suez par l'Ever Given fut, plus tôt cette année, un bon exemple des dégâts qu'un simple grain se sable dans cette complexe machinerie peut provoquer.
C'est ce qui inquiète certains experts, qui notent que l'économie mondiale actuelle concentre certaines de ses industries les plus importantes et connexions majeures dans certains points chauds du globe.
Ce sont ces risques que ces scientifiques ont souhaité souligner dans un article publié dans Nature Communication: même modestes, des éruptions volcaniques à proximité de certains de ces nœuds pourraient plonger l'économie mondiale dans le chaos.
Cascade
«Je ne cessais de penser au fait qu'ils sont tous dans les mêmes endroits –tous ces systèmes convergent, explique ainsi à Wired Lara Mani, de l'université de Cambridge. C'est terrifiant. Pourquoi personne n'en a-t-il parlé avant?»
L'un des points critiques cités est Taïwan, placée sur la ceinture de feu du Pacifique. L'île concentre notamment, mais pas seulement, une grande partie de la production mondiale de semi-conducteurs.
L'actuelle pénurie, qui n'a rien à voir avec une quelconque activité volcanique, a des répercussions globales et profondes qui laissent imaginer ce qu'il adviendrait si une éruption volcanique mettait les usines à l'arrêt.
Plus au sud, entre Taïwan et les Philippines, le Détroit de Luçon concentre le passage de nombreux câbles sous-marins. Leur éventuelle rupture pourrait ralentir l'activité de toute l'Asie du Sud-Est, comme ce fut le cas en 2006.
En Malaisie, le détroit de Malacca voit passer chaque année 40% du trafic maritime mondial également situé sur une zone sismique et volcanique sensible. Son blocage compliquerait sérieusement la bonne marche de l'économie mondiale.
L'Europe n'est pas épargnée: la Méditerranée aussi est une importante zone volcanique qui attend son heure, et une éruption, un séisme voire le tsunami qui pourraient suivre mettraient la région, et le monde à sa suite, à genoux.
Quant à l'Amérique du Nord, l'exemple du Mont Rainier est mis en exergue par les scientifiques, qui notent que certaines modélisations évoquent une facture de 7.600 milliards de dollars en cas d'éruption d'une intensité de 6 sur l'échelle citée supra.
La question n'est pas de savoir si une telle éruption est possible: elle l'est, et elle viendra. Aux volcanologues d'essayer de prévoir quand et sous quelle forme elle aura lieu et, grâce à cette étude, d'élargir la compréhension de ses effets, non seulement sur les populations locales, mais également sur le monde dans son ensemble.