S'il existe quelques belles armes à fourbir pour attaquer Donald Trump sur sa politique, le président américain peut (pour l'instant) fanfaronner sur le plan économique, car les États-Unis se portent plutôt bien.
L'année 2018 s'est soldée pour le pays par une croissance très respectable de 2,8% –contre 1,5% en France. Et si les analystes restent sur leurs gardes quant aux mois à venir, l'économie américaine continue sur sa lancée en ce début d'année, avec des prévisions de 3,2% de croissance pour le premier trimestre.
Mieux: le taux de chômage est à un niveau historiquement bas. Avec 263.000 emplois créés au mois d'avril 2019, il n'est plus que de 3,6%, le meilleur chiffre depuis 1969.
Apathie mystérieuse
L'économie classique est formelle: un tel niveau d'activité et de telles tensions sur le marché de l'emploi devraient se traduire par des salaires en hausse pour les Américain·es.
Or, s'ils croissent effectivement, ils le font moins vite qu'ils ne le devraient. Et comme l'explique Axios en parlant d'une apathie mystérieuse, les économistes semblent avoir du mal à comprendre le phénomène.
Entre avril 2018 et avril 2019, les salaires ont en moyenne augmenté de 3,5% aux États-Unis. Un chiffre non négligeable (en 2019, la hausse ne devrait être que de 2% en France), mais loin des niveaux atteints par le passé: près de 10% au début des années 1980, plus de 4% lors du pic de croissance des années 2000.
Les analystes expriment leur satisfaction quant à cette croissance des salaires, même si elle est plus modeste que ce que l'orthodoxie économique voudrait. Ce contentement tient à une chose: cette activité soutenue ne se traduit pas en inflation, longtemps considérée comme l'ennemi public numéro un de toute économie.
Lâcher la bride
Que l'inflation, estimée à 1,6%, soit si contenue explique qu'une partie des économistes osent sortir des vieux clous et se rappeler que les salaires, donc la consommation, sont également une bénédiction pour l'économie d'une nation. Ces spécialistes appellent donc les employeurs comme la Réserve fédérale à moins se soucier d'inflation et à lâcher plus largement la bride sur les salaires.
«La Fed devrait laisser l'économie chauffer à blanc, préconise Andrew Chamberlain, économiste en chef de Glassdoor, une plateforme spécialisée dans l'emploi. Nous sommes à l'un de ces moments historiques où les salariés en bas de l'échelle peuvent gagner quelque chose.»
Si la macroéconomie n'est pas sa seule motivation, un autre acteur –non des moindres et pas le moins surprenant– semble avoir compris que le moment était le bon pour faire un geste en direction de ce «bas de l'échelle»: Jeff Bezos, qui le 11 avril dernier lançait à ses concurrents le défi d'augmenter drastiquement les salaires minimums.