Un comble, mais peut-être aussi un signe des temps. Pour la première fois, en 2020, le football n'aura pas été la première source de revenus de la FIFA, la Fédération internationale de football association. L'instance, chargée entre autres de l'organisation de la Coupe du monde, a publié en mars son «Bilan financier 2020». Comme on pouvait s'y attendre, il n'est pas fameux.
La pandémie de Covid-19, qui a entraîné l'annulation ou le report de nombreux matchs et compétitions, a fait fondre ses revenus comme neige au soleil, passant de 765,7 millions de dollars en 2019 à 266,5 millions en 2020.
La billetterie, qui avait apporté 7,9 millions de dollars dans les caisses en 2019, a été réduite à néant, tandis que les produits des droits de retransmission télévisée ont été divisés par... 200. Au total, la FIFA enregistre une perte abyssale de près de 683 millions de dollars (581 millions d'euros) pour l'année.
Au milieu de ce marasme, une ligne ressort toutefois quasiment stable par rapport à 2019: celle intitulée «Produits des droits d'exploitation de licence», qui a généré 159 millions de dollars.
Et ce n'est pas en vendant des porte-clés que la FIFA a maintenu ces revenus, mais grâce au jeu vidéo, «qui a fait mieux que résister», se félicite la fédération dans son rapport financier. Les titres FIFA exploités en exclusivité par EA Sports comprennent notamment FIFA 20 ou FIFA 21, le jeu le plus vendu en France avec 1,3 million d'exemplaires écoulés en 2020.
Une balle dans le pied?
Privés de terrain, les fans de foot se sont rabattus en masse sur le football virtuel et leurs manettes de jeu. EA Sports compte 150 millions de joueurs toutes plateformes confondues et sa maison mère, Electronic Arts, atteint une capitalisation de presque 40 milliards de dollars.
En comparaison, Manchester City, le club le plus cher du monde, est évalué à 1,21 milliard de dollars. Une paille. Les compétitions d'e-sport, comme la FIFA eClub World Cup ou les FIFA eChallenger Series ont également mis du beurre dans les épinards.
Cet incroyable retournement de tendance montre la place croissante du sport virtuel dans le football. «La notion même du fan de football est en train de changer, assure David Jackson, vice-président d'EA Sports, à The Telegraph. Si un enfant qui grandit à Tokyo ou à Toronto devient fan du PSG, il est peu probable qu'il le soit parce qu'il a visité le Parc des Princes, mais beaucoup plus parce que son joueur préféré joue pour le PSG et qu'il en a appris davantage sur lui grâce aux jeux FIFA.»
Reste à savoir si la FIFA n'est pas en train de se tirer une balle dans le pied. Car les supporters, bannis des stades pendant de longs mois, risquent d'avoir pris définitivement goût à la version avatar des joueurs.
«Le jeu réel comme son jumeau numérique sont tous deux en compétition pour l'attention, met en garde The Telegraph. Et même si le jeu FIFA n'est en aucun cas bon marché (79,99 euros la version PS5), cela reste moins cher qu'un abonnement à la Premier League ou à la télévision payante.»