Le KFC livré refroidi, un à deux jours après commande, rencontre un étonnant succès à Gaza. Depuis près de treize ans, le territoire palestinien fait l'objet d'un blocus israélien, consécutif à la prise de pouvoir du Hamas.
Mais ces dernières années, le nombre de Gazaoui·es bénéficiant d'une autorisation de travailler en Israël augmente. Un entrepreneur local a saisi cette opportunité en lançant Cheetah Express.
Ce service de livraison de KFC via Instagram aurait déjà séduit 500 personnes. La nourriture provient de restaurants situés à Ramallah, en Cisjordanie –où KFC cartonne– à 100 kilomètres de là. Les livreurs sont principalement des ouvriers palestiniens travaillant en Israël. Une livraison nécessite de franchir quatre postes-frontières.
À la fin de leur journée en Israël, ils passent le poste-frontière de Qalandiya pour entrer en Cisjordanie et rejoindre Ramallah. Là-bas, ils prélèvent la commande et se rendent en taxi ou en bus jusqu'à Erez.
Ils passent alors un poste-frontière israélien, puis un poste-frontière de l'Autorité palestinienne pour entrer à Gaza. Ils prennent ensuite un taxi jusqu'au poste-frontière du Hamas, puis un dernier taxi pour livrer la commande. Ce qui allonge légèrement les délais de livraison.
Une fenêtre sur l'extérieur
Ainsi, lorsque Mohammed Baraka, 32 ans, a acheté un sandwich au poulet et du riz via Cheetah Express, il a récupéré sa commande deux jours plus tard. «La nourriture était froide, les emballages semblaient avoir été ouverts et le Coca-Cola qu'il avait commandé manquait. Pourtant, malgré l'attente et le fait qu'il avait dépensé un peu plus de 23 euros pour un sandwich et les frais de livraison, il était ravi», raconte Rest of World.
Comment expliquer que des gens soient prêts à payer aussi cher pour du fast-food froid? Le territoire palestinien est l'un des plus isolés au monde. Cheetah Express constitue donc l'une des seules possibilités pour accéder à une enseigne de nourriture américaine. Pour se faire plaisir et s'évader un petit peu.
«Les réseaux sociaux nous ont ouvert une porte, déclare Salma al-Qaddomi, bénévole pour une ONG et adepte des livraisons de poulet frit. Cela nous a donné l’impression que payer aussi cher pour un repas était quelque chose de normal.» Le service a toutefois été suspendu temporairement à cause du Covid-19.
Le succès du KFC dans le territoire n'est pas nouveau. En 2013, les commandes clandestines de poulet frit partaient d'Égypte et transitaient par des tunnels de contrebande. Les prix étaient les plus élevés au monde –27 euros le sandwich avec frites– mais la livraison ne prenait «que» quelques heures.