Sauve-qui-peut ou simple fluctuation conjoncturelle? Près de 90.000 résidents ont quitté Hong Kong au cours de ces douze derniers mois, un exode «sans précédent», selon le South China Morning Post. La population de la région administrative spéciale chinoise a ainsi chuté de 1,2% en une année, passant à 7,39 millions d'habitants, soit sa plus forte baisse depuis le début des données de recensement en 1961.
Certes, la pandémie de Covid-19 a largement contribué à cette diminution. «Les mesures strictes de contrôle aux frontières ont entraîné une interruption conséquente des arrivées internationales, y compris pour les titulaires d'un permis aller simple, les aides domestiques étrangers et ceux qui viennent travailler ou étudier à Hong Kong dans le cadre de divers programmes d'admission», mettent en avant les autorités.
Il n'empêche que la vague d'émigration qui touche la ville depuis un an devrait inquiéter les autorités, juge Paul Yip Siu-fai. Ce professeur titulaire en travail social et administration sociale à l'Université de Hong Kong souligne que les changements politiques intervenus récemment ne peuvent être ignorés: «Certains s'inquiètent des restrictions de la liberté d'expression, ainsi que des possibles répercussions sur le système éducatif», témoigne le chercheur.
Lors des mobilisations contre la nouvelle loi de sécurité intérieure ces derniers mois, certains manifestants exprimaient publiquement leur souhait de quitter le territoire, rappellent Les Echos. Le recours à des cabinets de conseil en immigration a fortement augmenté après l'adoption de la loi.
Fuite des capitaux
Autre signe inquiétant: le montant des retraits de fonds anticipés en raison d'un départ permanent a atteint un niveau record de 6,6 milliards de dollars hongkongais (720 millions d'euros) en 2020, soit une hausse de 27% par rapport à l'année précédente.
Les ressortissants hongkongais, réputés riches, éduqués et qualifiés, sont en tout cas accueillis à bras ouverts par de nombreux pays. En juillet 2020, Boris Johnson a ainsi annoncé l'extension des droits à l'immigration à plus de trois millions de Hongkongais afin de faciliter leur obtention de la nationalité britannique. Selon les estimations de Londres, 600.000 résidents de Hong Kong pourraient venir s'établir au Royaume-Uni dans les trois ans à venir.
Rien que sur les dix premiers mois de 2020, 216.398 passeports BNO (qui autorisent ses détenteurs à séjourner outre-Manche sans visa) ont été accordés, «soit un toutes les cinq minutes», indique le rapport. D'autres pays comme l'Australie, le Japon ou Taïwan ont adopté des procédures similaires pour faciliter l'arrivée de ces citoyens très convoités.
Tout en qualifiant ces mesures d'«ingérence dans les affaires étrangères de la Chine», Pékin se garde bien de tout alarmisme. «Hong Kong étant une ville internationale, sa population a toujours été mobile», rassure un porte-parole du gouvernement. Selon le cabinet d'analyse Global Data, la population fortunée (investisseurs détenant entre 50.000 et un million de dollars d'actifs et particuliers détenant plus d'un million de dollars d'actifs) devrait augmenter de 7,8% pour atteindre 3,9 millions de personnes en 2021. Finalement, tout va bien?