Jack Ma n'est pas étranger aux chiffres polémiques. En avril dernier, le patron du géant chinois Alibaba et homme le plus riche du pays, arguait que le «996», une cadence de douze heures de travail par jour, six jours par semaine, était une condition sine qua non de l'accomplissement personnel et professionnel.
L'ire qu'il a alors provoquée a peut-être fini par le faire réfléchir, sinon à sa vision du travail, du moins à son idée de la communication.
L'IA à la rescousse
Le 29 août, lors d'une discussion publique à Shanghai avec Elon Musk, dont on connaît également l'amour pour les horaires très étendus, Jack Ma a déclaré que l'être humain pourrait dans un avenir pas si lointain se contenter de douze heures de labeur non pas par jour, mais par semaine.
Comment? En se reposant –c'est le cas de le dire– sur l'intelligence artificielle, domaine sur lequel la Chine mise gros face aux États-Unis. Jack Ma compare son surgissement dans nos vies et nos emplois à celui de l'électricité.
«Le pouvoir de l'électricité a été de donner plus de temps aux gens pour qu'ils puissent aller danser ou faire des karaokés le soir», a-t-il avancé, oubliant au passage que l'éclairage artificiel avait allongé la durée des journées dans les usines ou les mines et permis le travail de nuit.
«Je pense que grâce à l'intelligence artificielle, les gens auront plus de temps pour apprécier le simple fait d'exister en tant qu'êtres humains», a précisé le patron chinois. Celles et ceux qui, immanquablement, devront continuer à turbiner sur des chaînes de montage ou aux champs apprécieront sans doute cette vision optimiste.
Le pari de l'éducation
Jack Ma n'est pas pour autant béat d'admiration face à un futur forcément éclatant: il est conscient que sa vision ne peut se réaliser que si les sociétés s'ajustent aux bouleversements qui viennent, en particulier grâce à l'éducation.
«Dans les dix ou vingt prochaines années, chaque humain, pays, gouvernement devrait travailler à réformer le système éducatif, pour s'assurer que nos enfants trouveront un emploi. Si nous ne le faisons pas, alors nous aurons tous des problèmes», a-t-il averti.
Selon le patron d'Alibaba, les systèmes actuels d'apprentissage, issus de la révolution industrielle, sont dépassés. Il ne prophétise pas pour autant un grand remplacement robotique. «Les ordinateurs n'ont que des microprocesseurs, quand les humains ont des cœurs, et c'est du cœur que vient la sagesse», a-t-il glissé, dans un bel élan poétique.
Elon Musk n'a pu qu'exprimer son accord avec les visions de Ma, tout en en profitant pour placer une référence à Neuralink, l'interface homme-machine sur laquelle l'une de ses entreprises travaille activement.
Plus technique que son interlocuteur chinois, l'entrepreneur américain a évoqué une «éducation à bas débit». «Plus tard, avec Neuralink, on pourra accéder à n'importe quel sujet instantanément, ce sera comme dans Matrix», a-t-il ajouté.