Le terme karōshi, qui signifie en japonais «mort par dépassement du travail», désigne les décès causés par le surmenage dans son emploi. Ces morts sont essentiellement causées par des arrêts cardiaques, des AVC ou des suicides, à la suite d'un excès de stress et d'une quantité déraisonnable de travail.
Ces accidents du travail ont longtemps été vus comme une curiosité culturelle purement nippone, raconte Wired. Dans les années 90, explique la sociologue spécialiste de la question Junko Kitanaka, les universitaires d'Europe et d'Amérique du Nord avait bien du mal à comprendre pourquoi des cadres dans la fleur de l'âge pouvaient ainsi mourir d'un excès de travail sans réagir.
Seulement, poursuit Wired, une récente étude de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) montre que les morts par AVC ou problèmes cardiaques à la suite d'un excès de travail n'ont rien d'une spécificité nippone, mais sont bel et bien un phénomène global.
Selon l'étude, plus de 745.000 personnes dans le monde sont mortes d'un AVC ou d'une cardiopathie ischémique liés à de longues heures de travail, un chiffre en hausse de 29% depuis 2000.
Dangereux après 55 heures
Pire: avec la pandémie, cette tendance s'accélère. Le nombre de personnes travaillant de longues heures augmente et «représente actuellement 9% du total de la population mondiale», explique l'étude. En cause, la frontière entre maison et travail brouillée par le télétravail, ainsi que les entreprises où une partie de la force de travail a interrompu son activité, augmentant la charge de celles et ceux encore en poste.
D'après la docteure Maria Neira, directrice du département Environnement, changements climatiques et santé à l'OMS, «travailler 55 heures ou plus par semaine représente un grave danger pour la santé». En effet, à 55 heures ou plus, le risque d'AVC augmente de 35% et celui de cardiopathie ischémique de 17%.
Au Japon, si tout le monde est désormais au fait de ce danger pour la santé publique, le pays rechigne à instaurer des garde-fous trop stricts. Depuis avril 2019, le gouvernement a bien imposé une limite maximum sur les heures supplémentaires, mais elle s'élève à 100 heures par mois.
Cette mesure est considérée comme largement insuffisante par les militants anti-karōshi. Pour Makoto Iwahashi, de l'association japonaise pour les droits des travailleurs POSSE, «le gouvernement nous dit “Si vous travaillez tant que ça, vous pourriez mourir –mais vous pouvez travailler tant que ça”».