Les ventes devaient débuter le 1er août. Le dernier kit Lego de l'aéronef hybride Bell Boeing V-22 Osprey, un appareil de transport de l'armée américaine, avait même été envoyé à plusieurs chaînes de magasins de jouets.
À dix jours de sa sortie, le 21 juillet, le fabricant danois a pourtant décidé de faire marche arrière sous la pression de l'association pacifiste allemande German Peace Society-United War Resisters (DFG-VK).
Cette dernière s'était lancée dans une grande campagne de protestation contre l'avion sous la bannière «On aime les briques, pas la guerre!», des manifestations étant même organisées devant les magasins de la marque.
«Le Bell Boeing V-22 est un avion militaire utilisé dans les guerres en cours comme au Mali, au Yémen et autres. Avec la sortie de ce kit, Lego aurait violé les valeurs et les objectifs de sa propre entreprise», affirme Michael Schulze von Glaßer, directeur de la DFG-VK.
En 2010, Lego avait en effet publié une charte spécifiant «d'éviter les armes et les équipements militaires réalistes […] et de s'abstenir de montrer les produits Lego dans des situations violentes ou effrayantes», la marque ne souhaitant pas «s'associer à la glorification des conflits et des comportements non éthiques ou nuisibles».
Dans un communiqué, Lego s'est donc résolu à reconnaître son erreur. «Bien que l'illustration montre clairement une version de sauvetage de l'avion, l'appareil a un usage strictement militaire. Nous avons depuis longtemps pour politique de ne pas créer de décors mettant en scène de véritables appareils liés à la guerre, c'est pourquoi il a été décidé de ne pas procéder au lancement de ce produit», a notifié la marque.
Valeurs à géométrie variable
DFG-VK s'est aussitôt empressée de crier victoire. «La réaction de Lego a dépassé nos attentes, s'est félicité Michael Schulze von Glaßer. Nous avions essayé à plusieurs reprises de l'alerter sur ce kit mais nous n'avions jamais reçu de réponse. Nous sommes donc heureux qu'il ait admis son erreur et en ait tiré les conséquences. Nous espérons que cela lui servira de leçon à l'avenir.»
Mais derrière l'affichage de bonnes intentions, la politique de Lego est empreinte d'une certaine hypocrisie. La marque surfe allègrement sur le succès de sa licence Star Wars, qui représente ses plus grosses ventes, et elle écoule ses bateaux pirates à tour de bras. Pas franchement le monde des Bisounours auquel elle voudrait nous faire croire.
Le devenir des boîtes de Bell Boeing V-22 Osprey est lui scellé. Dans un souci environnemental, DFG-VK espère que les briques seront «recyclées pour d'autres produits». Certains kits ont cependant déjà été écoulés dans des magasins, ce qui devrait en faire des collectors exceptionnels auprès des amateurs et amatrices. Le kit Taj Mahal, contenant pas moins de 5.922 briques qui est sorti en 2008 à 250 euros, est par exemple aujourd'hui estimé à plus de 2.500 euros.