Lorsque le Bitcoin a été créé en 2008, l'idée était de protéger les épargnants de l'influence des banques centrales et des gouvernements, qui imprimaient alors de la monnaie à tout-va.
Dès le départ, il a été décidé que 21 millions de Bitcoins au maximum pourraient être créés, constituant ainsi une parade à sa perte de valeur. Il existe néanmoins un autre mécanisme pour faire artificiellement gonfler la valeur d'une monnaie: la détruire.
C'est la technique utilisée par Luna, une cryptomonnaie lancée par Terraform Labs en janvier 2018 et qui vient d'entrer dans le top 10 des cryptomonnaies avec une capitalisation boursière de 28,8 milliards de dollars (25,4 milliards d'euros).
Luna est ce que l'on appelle un «stablecoin», c'est-à-dire que sa valeur est indexée sur celle du dollar (plus exactement, son jeton est utilisé pour stabiliser le stablecoin TerraUSD (UST).
Le 4 décembre, le Luna a franchi la barre des 75 euros, soit une multiplication par cinquante de sa valeur depuis le début de l'année, alors que le jeton valait à peine 1,46 euro. Mieux: Luna a réussi un magnifique rebond début décembre alors que les autres cryptomonnaies dégringolaient en bourse.
Rareté artificielle
Pour réussir cette performance, les développeurs de Luna ont adopté une tactique bien connue: détruire du cash pour créer un phénomène de rareté.
Selon le livre blanc du protocole, les détenteurs de Luna ont la possibilité de soumettre et de voter leur propres propositions de gouvernance. Or, début décembre, ces derniers ont décidé de supprimer environ 88 millions de Luna de la blockchain en l'échangeant contre de l'UST, ls stablecoin de Terra.
«L'économie de Luna est conçue pour être déflationniste, et au cours du dernier mois, nous avons vu 100 millions de jetons être brûlés et retirés à jamais du marché», explique à Bloomberg Hayden Hughes, directeur général d'Alpha Impact, une plateforme de commerce social. «Cette réduction de l'offre combinée à la une hausse dé la récompense attribuée aux mineurs a créé un choc d'offre qui a fait gonfler la valeur.»
Luna doit aussi sa soudaine popularité à plusieurs mesures récemment votées par les investisseurs, comme la possibilité d'exporter de l'UST vers d'autres réseaux blockchain et vers des logiciels fiscaux (une option appréciée dans la mesure où le gouvernement américain renforce les règles relatives aux obligations fiscales des cryptomonnaies).
«Terra a également conclu des partenariats pour des jeux du métavers, avec des noms comme Summoner's War, ce qui lui permet de profiter de l'engouement pour tous les investissements liés à ce concept», souligne aussi le site Investing.com.
La stratégie de détruire du cash pour créer de la valeur n'est pas du tout nouvelle. «Les développeurs de cryptomonnaies brûlent souvent des jetons pour augmenter la rareté», rappelle Bloomberg.
C'est également le principe du rachat d'actions, massivement adopté par les entreprises bourrées de liquidités et qui ne savent pas quoi faire de leur argent. Depuis 2013, Apple a ainsi dépensé plus de 460 milliards de dollars dans ces opérations, soit 10 milliards d'actions détruites en huit ans.