Vous le reconnaissez? | Chris Torres / Rob Bulmahn via Flickr
Vous le reconnaissez? | Chris Torres / Rob Bulmahn via Flickr

500.000 dollars pour le Nyan Cat: les fans de cryptos dépensent des millions en mèmes

Posséder une œuvre reproductible à l'infini, ça change tout.

«J'ai l'impression que nous avons ouvert les vannes», a expliqué Chris Torres lors d'une interview donnée, éberlué, après son joli coup du 18 février, raconté par le New York Times.

Torres est l'inventeur, en 2011, du Nyan Cat, petit chat anguleux chevauchant dans la joie un arc-en-ciel, sans doute le mème le plus célèbre de la culture numérique mondiale.

Comme les autres mèmes, Nyan Cat est devenu une sorte de bien commun du patrimoine numérique de l'humanité, par nature duplicable à l'infini, partagé, copié, collé et vu des milliards de fois. Sa possession a fini par échapper des mains de Chris Torres et la chose, d'une certaine manière, appartient désormais à tout le monde.

Quelqu'un en a pourtant fait l'acquisition. Lors d'une mise aux enchères organisée par Torres sur le site spécialisé dans la vente des œuvres numériques Foundation, le Nyan Cat a été acquis pour 300 ETH (pour ethereum, la seconde cryptomonnaie la plus célèbre après le bitcoin) par une personne dont l'anonymat est garanti par la blockchain.

300 ETH, soit au moment de la vente un peu plus d'un demi-million de dollars, près de 420.000 euros: les vannes ont effectivement été ouvertes, et en grand. Mais la mode de la collection des biens numériques n'a néanmoins pas attendu cette acquisition exceptionnelle pour se faire remarquer, comme l'expliquent le NYT et Wired.

Des personnes, qualifiées par Wired comme étant l'«élite du bitcoin», dépensent ainsi des fortunes dans l'acquisition de ces crypto-collectors un peu spéciaux, basés sur le principe du «token non-fongible» (NFT). En droit, un bien non-fongible est défini par des caractéristiques uniques et n'est pas interchangeable –c'est par exemple le cas d'une œuvre d'art.

Ces NFTs ont vu le jour fin 2017 avec les CryptoKitties, que l'on peut grossièrement résumer comme un équivalent félin et numérique des cartes Pokémon numériques, dont la possession et l'authenticité sont basées sur la blockchain, en l'occurrence celle de l'ethereum.

Crypto-collections

Depuis 2017, le phénomène a pris de l'ampleur et a quitté le domaine restreint des petits chats colorés. Le token d'un clip vidéo de LeBron James en action lors d'un match des Lakers a ainsi été vendu 100.000 dollars en janvier.

L'actrice Lindsay Lohan a vendu le NFT d'une image de son visage pour la modique somme de 17.000 dollars –la non-chose a depuis changé de non-main en étant revendue à 57.000 dollars. Avec force publicité et peut-être des records en prévision, Christie's s'apprête à mettre aux enchères un NFT du designer Beeple, constitué de 5.000 images numériques –le même Beeple avait déjà, fin 2020, vendu une œuvre pour 777.777.77 dollars.

De simples tweets transformés en tokens non-fongibles ou des replays de matchs de NBA peuvent même trouver acquéreur sur ce marché de la crypto-collection qui, selon le site spécialisé NonFongible.com, repris par Wired, a représenté un volume d'échanges de 205 millions d'euros en 2020.

Ces biens non-fongibles ont ceci de particulier qu'ils ne sont, justement, pas des biens comme on l'entend généralement. «Les acquéreurs n'achètent pas les droits, la marque ni même la possession unique de ce qu'ils paient. Ils achètent les droits de se vanter, et le fait de savoir que leur copie est “l'authentique”», écrit Erin Griffith pour le New York Times.

Le petit monde en rapide croissance des NFTs peut donc sembler particulièrement futile lorsque sa technologie s'applique à des mèmes, à des photos de vedettes ou à un équivalent moderne des cartes Pokémon.

Mais comme l'expliquent le NYT et Wired, l'enjeu est pourtant bien plus vaste que ces crypto-collections d'images Panini 2.0 pour personnes aussi snobs que fortunées. Car les NFTs peuvent contribuer à résoudre l'un des problèmes les plus cruciaux des artistes modernes: la monétisation d'œuvres auxquelles une reproductibilité infinie peut faire perdre toute valeur.

Chacun peut télécharger le Nyan Cat. Mais une personne unique en possède désormais la copie «officielle», à laquelle les règles économiques du marché de l'art peuvent désormais s'appliquer –et son créateur a été rémunéré pour son œuvre.

En ce moment

La 155e brigade d'infanterie de marine russe, l'unité qui a été détruite huit fois en Ukraine

Et Cætera

La 155e brigade d'infanterie de marine russe, l'unité qui a été détruite huit fois en Ukraine

Ouch.

L'hallucinant rififi des «salopards» américains engagés en Ukraine

Et Cætera

L'hallucinant rififi des «salopards» américains engagés en Ukraine

Des volontaires sans filtre: quelques affabulateurs ou voleurs ont aussi fait le voyage.

☢️2,5 tonnes d'uranium dans la nature 🎧AirPods, un scandale écologique ⛽Les prix du pétrole: l'hebdo de korii.

Et Cætera

☢️2,5 tonnes d'uranium dans la nature 🎧AirPods, un scandale écologique ⛽Les prix du pétrole: l'hebdo de korii.

Six actus à (re)découvrir en ce dimanche.