Réfléchir à l'échec d'un nouveau produit avant même qu'il ne soit officiellement présenté semble une étrange idée. Alors qu'Apple a annoncé pour le 10 septembre un événement centré sur le dévoilement de son nouvel iPhone, il y a de quoi s'interroger sur la santé d'une poule aux œufs d'or ayant représenté, lors du dernier trimestre, plus de 48% du chiffre d'affaires du géant californien.
Le temps du «one more thing» conquérant, de l'excitation juvénile de la nouveauté et des fuites guettées par des armées de fans avides paraît appartenir à un passé révolu.
Stagnation technologique
Apple ne fait plus rêver et se fait tailler des croupières par une concurrence remontée, Samsung en tête. Si l'entreprise reste capable de jolis coups de poker, les itérations 2019, supposément secrètes jusqu'au 10 septembre mais dont toutes les nouveautés semblent déjà connues, n'échapperont pas au bâillement ennuyé de la clientèle.
Un meilleur appareil photo (mais une protubérance déjà jugée très laide en Chine), une solidité accrue, un FaceID amélioré, quelques détails: a priori, rien qui ne vaille de craquer son PEL pour investir dans la chose si le besoin n'est pas immédiat, d'autant que la très attendue 5G ne sera accessible que pour la prochaine génération d'iPhone.
C'est une tendance lourde du marché. Dans les pays occidentaux, consommateurs et consommatrices restent attachées à leurs coûteux smartphones plus longtemps qu'avant –trois ans aux États-Unis.
Ces cycles allongés sont l'un facteurs expliquant la morosité globale du secteur. Selon le cabinet Gartner, les ventes de smartphones à l'échelle mondiale ont baissé de 1,7% au second trimestre 2019. La contraction est, note un analyste, plus marquée pour les appareils haut de gamme que pour ceux d'entrée ou de moyenne gamme.
Si, malgré les vents contraires, Samsung continue de croître, Apple décline: l'Américaine a vendu 38,5 millions d'iPhone lors de ce même second trimestre 2019, contre 44,7 à la même époque l'an passé.
Passer à autre chose?
Sauf nouveauté miraculeuse inversant la tendance, les choses risquent d'empirer pour Apple, en particulier aux États-Unis. Une hausse de 15% des taxes douanières imposées par l'administration Trump aux produits issus de Chine touche déjà certains objets de l'entreprise américaine (les très en vogue Apple Watch ou AirPods notamment), alors que le précieux iPhone pourrait être directement impacté en décembre.
L'iPhone a déjà pris un joli gadin début 2019 –ses ventes ont notamment chuté de 27% en Chine. Le reste de l'année comme celle qui suit pourraient être plus turbulentes encore.
Apple a compris qu'un certain âge d'or était passé. Assise sur un imposant trésor de guerre, la société de Cupertino renforce ses investissements dans le marché des services (Apple Music, Apple TV+, Apple News, Apple Arcade, etc.), afin de diversifier ses revenus.
Peut-être, ce faisant, redonnera-t-elle à de prochains iPhone, plus désirables et révolutionnaires, une place centrale dans cet écosystème complet.