Chaque année, Ferrero s'accapare un tiers de la production mondiale de noisettes pour fabriquer sa célèbre pâte à tartiner Nutella. Le géant italien s'approvisionne principalement en Turquie, qui représente 65% à 70% de la production mondiale.
Ces dernières années en Italie, Ferrero a été vertement critiqué pour sa dépendance à l'égard de la Turquie, jugée peu compatible avec les notions de durabilité et de droits sociaux. D'autant qu'en 2018, Barilla a lancé une pâte à tartiner avec des noisettes garanties 100% italiennes et sans huile de palme.
Sous la pression, le groupe a donc décidé de relocaliser une partie de son approvisionnement, dans le cadre d'un plan baptisé «Progetto Nocciola Italia» (projet noisette italienne). Un plan qui vise à accroître la production nationale de noisettes de 30% d'ici 2025.
En Italie, les noisettes sont traditionnellement cultivées autour de Vignanello, au centre du pays. Mais la soudaine hausse de la demande a poussé de nombreux agriculteurs, autrefois diversifiés dans les olives et les vignes, à se convertir massivement à la culture de noisettes, raconte un article du Financial Times.
Le nutella, mauvais pour la santé et l'environnement
Dans les vallées environnantes, les vignes ont laissé place à la monoculture de noisettes, très gourmande en eau. «La culture de la noisette a littéralement explosé», déplore Giacomo Andreocci, qui dirige une ferme biologique des collines du nord de Rome. «Les noisetiers sont maintenant plantés partout et aspirent toutes les ressources de notre terre.» La monoculture de noisettes est également accusée de propager certaines maladies et insectes ravageurs, et de pousser à une augmentation de l'usage de pesticides et d'herbicides.
Ferrero se défend de toute atteinte à l'écosystème, arguant que les nouvelles plantations se concentrent sur les terres agricoles encore non cultivées et s'intègrent harmonieusement au milieu des autres cultures. En Italie, un clivage s'est créé entre les défenseurs de l'environnement et ceux qui voient dans la production de noisettes une opportunité économique.
«Ce débat est surréaliste», s'énerve ainsi Lorenzo Bazzana de Coldiretti, le représentant du syndicat italien des agriculteurs. «La monoculture, qu'elle soit de blé, de maïs ou de vigne, n'est pas nouvelle. C'est à chaque entrepreneur de faire ses propres choix et d'avoir la responsabilité d'employer des techniques agronomiques qui respectent l'environnement.»
Il est difficile pour les entreprises de répondre à la fois aux exigences des consommateurs, qui réclament plus de produits fabriqués localement, et aux critiques des défenseurs de l'environnement qui voudraient préserver une agriculture traditionnelle. En Californie, les producteurs d'amandes font face aux mêmes reproches et sont accusés d'assécher toutes les ressources en eau. En Espagne, c'est l'avocat qui suscite les foudres des écologistes.