Pas vu, pas pris. Ou presque. | David Ryder / Getty Images North America / AFP
Pas vu, pas pris. Ou presque. | David Ryder / Getty Images North America / AFP

Pour échapper aux sanctions, les tankers russes se font invisibles

Un marché parallèle du pétrole est en train de naître.

Les spécialistes nomment le phénomène «dark activity», ou «l'activité sombre»: en débranchant de plus en plus souvent leur AIS, système d'identification automatique permettant à un navire d'être suivi en temps réel, les tankers russes semblent dissimuler de louches activités.

Si l'Union européenne n'a pas encore franchi le pas, les États-Unis ou le Royaume-Uni ont banni les importations de pétrole russe. Mais le régime des sanctions imposé à la Russie par certains pays occidentaux fonctionne par ramification: une firme prise à trafiquer une commande auprès d'une homologue russe pourrait dans certains cas être poursuivie.

«Il n'y a aucune raison pour que ces vaisseaux n'éteignent leur AIS», explique à Bloomberg Gur Sender, expert pour la firme israélienne Winward, qui surveille ces situations douteuses et les risques d'illégalité qu'elles peuvent provoquer pour sa clientèle. «Enquêter sur la possibilité qu'un navire soit engagé dans des pratiques trompeuses relatives à certains régimes est crucial pour protéger son business de deals avec des entités sanctionnées.»

Mais si nombre de ports lui sont désormais fermés, le pétrole russe n'a pas arrêté de couler à flot et cherche encore à trouver preneur. L'Inde, qui a refusé de condamner l'invasion de l'Ukraine par la Russie, est ravie de profiter de la situation pour obtenir de très substantielles remises sur son crude, mais les débouchés ne sont pas toujours aussi évidents.

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Alors les tankers russes se font invisibles, et multiplient semble-t-il ces «activités sombres» pour faire passer, en douce, leur précieuse cargaison pétrolière. «La Russie est rapidement devenue un État paria, donc elle obscurcit ses activités, parce que beaucoup de gens des deux côtés d'un échange ne veulent pas être associés au pays d'une quelconque manière», dit Ian Ralby, autre expert de la chose maritime et de ses embrouilles.

«Nous pourrions voir émerger un marché global parallèle dans lequel on verra se développer un commerce entre ces États sanctionnés et leurs facilitateurs», poursuit-il, inquiet de la multiplication de «manipulations criminelles et malfaisantes» qu'accompagne la mise en place de sanctions globales.

Selon Winward, une partie de la dark activity des pétroliers russes consiste à retrouver quelque part, AIS débranché, un navire ne battant pas pavillon russe, à transférer discrètement le pétrole d'un bateau à l'autre, et à repartir comme si de rien n'était.

Comme si de rien n'était, ou presque: bien que discrètes, ces activités peuvent néanmoins parfois être surveillées et détectées grâce à l'imagerie satellite, comme tente de le faire Winward, qui établit des statistiques sur le phénomène.

La firme a également noté qu'un nombre inhabituellement grand de navires accostaient pour la première fois dans des ports russes. Cela marque probablement le début de la transformation des circuits pétroliers globaux et, surtout, la tentative de nombreux acteurs de profiter du chaos ambiant pour faire de très juteuses affaires, pourtant parfois déjà rendues illégales dans leurs propres pays.

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