C'est le nouveau mot à la mode à Wall Street: le terme «premiumisation» («premiumization») a été employé durant soixante audioconférences sur les résultats financiers et autres réunions avec les investisseurs au cours des trois dernières semaines, selon le New York Times. Alors, kézako? Comme son nom l'indique, la premiumisation consiste à mettre sur le marché des versions «premium», améliorées mais aussi plus chères, de produits ou de services existants.
Ainsi, la chaîne de donuts Krispy Kreme, qui avait tout misé sur les promotions l'an dernier, s'apprête à lancer une offre de «spécialités de donuts premium», plus qualitatifs mais plus coûteux. Plus surprenant, WD-40, qui fabrique le lubrifiant (pour voitures) du même nom, s'est rendu compte que ses clients étaient prêts à débourser davantage pour un contenant doté d'une «paille intelligente» permettant de verser le produit dans deux directions différentes.
«La premiumisation crée des opportunités de croissance du chiffre d'affaires, accroît les marges et, surtout, elle ravit nos utilisateurs finaux», claironne Steve Brass, directeur général de WD-40. La chaîne de parcs à thème Six Flags a récemment augmenté ses prix et diminué les réductions, avec des résultats mitigés sur le plan économique. Son concurrent Walt Disney a en revanche pris le chemin inverse.
Gentrification de tout
Soyons clairs: cette stratégie représente surtout une tentative des grandes entreprises de conserver leurs marges dans un contexte économique de plus en plus difficile. Peuvent-elles faire autrement? Le problème, c'est qu'en se concentrant toujours plus sur les clients qui peuvent payer davantage, elles risquent d'exclure de façon croissante les clients les plus pauvres.
Ainsi, sur le marché automobile américain, fin 2017, 36 modèles étaient disponibles à l'achat pour un coût inférieur à 25.000 dollars (23.650 euros). Fin 2022, ce chiffre était tombé à 10, et représentait moins de 4% des ventes de véhicules. Cela est en partie dû à la hausse du prix des pièces détachées et aux sous-effectifs, mais reflète aussi une stratégie des constructeurs axée sur la vente de véhicules plus chers et plus rentables (pour eux).