Sa société a récemment fait les gros titres. Norilsk Nickel, propriété du milliardaire Vladimir Potanine et spécialisée dans l'exploitation du nickel et du palladium, est à l'origine de la fuite de 21.000 tonnes de carburant dans un cours d'eau de l'arctique russe fin mai dernier.
Réprimandé par le président Poutine en personne, l'entrepreuneur semble alors avoir pris conscience d'une réalité indiscutable: l'avenir de ses exploitations dépend de celui d'un permafrost bien mal en point.
La catastrophe environnementale majeure du mois de mai n'est pas due au hasard. Ce jour-là, les piliers du réservoir de carburant de Norilsk Nickel ont cédé à cause de la fonte du sol gelé de la région, appelé pergélisol ou permafrost.
Tandis que le changement climatique s'accélère en Sibérie (+3° Celsius en moyenne en trente ans) et que des températures records baignent la région, son permafrost se dégèle rapidement et les nombreuses infrastructures construites dessus s'effondrent.
La société de Vladimir Potanine est particulièrement vulnérable face à ce phénomène. Au total, 85% des routes, des pipelines et des usines de l'entreprise se trouvent sur ce pergélisol fondant, selon Morgan Stanley.
Le richissime homme d'affaires admet avoir sous-estimé l'exposition de sa société aux variations du pergélisol et sa fortune colossale, estimée à 27,8 milliards de dollars [23,5 milliards d'euros], pourrait en faire les frais, comme le relate Bloomberg.
L'oligarque est aujourd'hui obligé de payer des centaines de millions de dollars pour réparer les dégâts et sécuriser ses installations. Il a également vu sa valeur nette baisser de 1,6 milliard de dollars [1,4 milliards d'euros] en vingt-quatre heures après l'accident du printemps, selon le classement des milliardaires tenu en temps réel par Forbes.
Ainsi fond, fond, fond
Ses finances ne sont pas les seules à voir les horizons s'obscurcir à mesure que les températures augmentent. Le problème de Potanine est aussi un problème national russe: 60% du territoire est constitué de pergélisol.
Si les estimations de l'Académie russe des sciences s'avèrent exactes, c'est-à-dire que la zone de permafrost du pays diminue de 25% d'ici 2080, ce sont près de 250 milliards de dollars d'infrastructures qui pourraient disparaître –dont une partie appartient au milliardaire.
Le vaste complexe minier que gère l'homme d'affaires attire depuis longtemps les foudres des écologistes. Les fonderies de Norilsk Nickel sont les plus gros émetteurs de dioxyde de soufre au monde et, bien que la compagnie dépense des sommes colossales pour tenter de limiter son empreinte écologique, ses activités continuent d'avoir des conséquences dramatiques pour l'Arctique et la planète.
Paradoxalement, Norilsk Nickel sert aussi les intérêts des organisations qui défendent l'environnement. Le nickel qu'il extrait et transforme est un élément incontournable de la chaîne de fabrication des batteries des véhicules électriques.
Avec l'arrivée massive des nouveaux modèles de voitures électriques, la demande de nickel devrait exploser dans les années à venir, jusqu'à atteindre les 353.000 tonnes en 2025, selon BMO Capital Market. Quant au paladium, il est devenu l'un des métaux les plus chers du monde.
De quoi faire fleurir les affaires de Vladimir Potanine? Sans aucun doute, à condition qu'il prenne rapidement l'avenir du permafrost en considération.