De mémoire récente, difficile de penser à un phénomène qui a changé le visage des métropoles du monde entier aussi vite que les trottinettes électriques. En quelques mois, les trottoirs de Paris, New York, São Paulo et bien d'autres se sont retrouvés envahis de véhicules colorés à deux roues en libre-service.
Ces moyens de transport ont poussé à une telle vitesse que les pouvoirs publics ont dû faire passer en urgence des lois ou règlements pour déterminer dans un cadre strict qui pouvait les conduire, où et comment les garer. En France, les pouvoirs publics ont décidé de prendre des mesures pour «en finir avec l'anarchie», et ont interdit aux personnes qui les utilisent de rouler ou de se garer sur les voies piétonnes.
D'autre villes, comme San Diego en Californie, ont choisi le laisser-faire. Erik Caldwell, qui travaille pour la ville, estime béatement que «les millenials et post-millennials veulent vivre dans une ville vibrante qui dispose de choix dynamiques de mobilité».
Cela ne plaît pas à tout le monde, en particulier aux commerces excédés par les flottes d'engins à deux roues qui gênent leurs entrées ou leurs terrasses. Deux hommes ont vite compris comment ils pouvaient y trouver leur compte.
La chasse est ouverte
Le New York Times relate le parcours de John Heinkel et Dan Borelli, des «repo-men». Aux États-Unis, ces «agents de repossession» sont chargés de récupérer des biens par n'importe quel moyen, souvent des voitures achetées à crédit et dont la dette n'a pas été payée. Flairant un bon coup, les deux Californiens ont décidé de passer des voitures à des transports plus dynamiques.
Leur start-up, ScootScoop, propose aux commerces de la ville de venir retirer les trottinettes lorsqu'ils considèrent qu'elles sont garées sur leur propriété privée. Les deux hommes ont créés des partenariats avec 250 établissements locaux et affirment avoir récupéré plus de 12.500 véhicules.
Les trottinettes sont ensuite stockées dans des petits locaux fermés ou sur un grand terrain en périphérie –une fourrière privée, surveillée par des chiens et des caméras. Si Bird, Lime, Uber et les autres veulent récupérer leurs biens, elles doivent payer 50 dollars (45 euros) par engin, auxquels s'ajoutent 2 dollars par jour de stockage.
Les entreprises se sont d'abord pliées au jeu. L'an dernier, Bird a même payé 40.000 dollars à ScootScoop afin de récupérer 1.800 trottinettes. Bird et Lime essayent désormais de mettre fin à cette petite entreprise.
Les deux sociétés accusent Heinkel et Borelli de prendre leurs propriétés en otage. Chacune a enregistré une plainte. «Ils nous prennent pour des péquenauds avec un pick-up. Nous sommes des businessmen», ont répondu les repo-men. En hommes d'affaires aguerris, les associés ont à leur tour attaqué les entreprises en justice.