Début décembre, Warner a fait une annonce qui a eu l'effet d'un coup de tonnerre dans le monde du cinéma: tous ses films prévus pour 2021 sortiront simultanément dans les salles et sur la plateforme de streaming HBO Max.
Parmi ces films, plusieurs blockbusters (The Suicide Squad, Matrix 4, Tom et Jerry) qui, dans un contexte pré-Covid, auraient sans doute fait se déplacer des millions de personnes dans les cinémas. Si cette annonce a mis en colère les exploitants de salles obscures et certains réalisateurs, les pirates, en revanche, se réjouissent.
Car tant qu'un film n'est disponible qu'au cinéma, il n'est généralement pas présent sur les sites illégaux de streaming et de téléchargement. Au pire, une version «cam» est disponible, enregistrée clandestinement dans une salle mais disposant d'une qualité vidéo et audio désastreuse.
Or, à la seconde où un film est diffusé à la télévision, sur internet ou sur support optique, des copies illégales surgissent un peu partout sur le web, et il est impossible de revenir en arrière.
Logiquement, ce devrait être un risque supplémentaire pour les studios. Mais Wired, par la plume d'Abigail De Kosnik, directrice du Berkeley Center for New Media, souligne que ce n'est pas forcément le cas.
Sauvez un studio, piratez un film
Une personne qui regarde un film piraté ne représente pas nécessairement un manque à gagner pour un studio. Certes, elle ne paye pas son billet mais elle pourra tout de même faire la promotion du long-métrage sur les réseaux sociaux, acheter des produits dérivés ou contribuer à populariser une franchise.
Le meilleur exemple est certainement Game of Thrones, série la plus piratée de l'histoire et plus souvent visionnée illégalement que légalement. La masse des pirates a contribué à faire de la série un phénomène culturel, ce qui l'a en retour rendue extrêmement profitable.
Le studio qui bénéficiera le plus de ce phénomène sera certainement Disney. L'entreprise profite certes des places de cinéma, ainsi que des abonnements à Disney+. Mais son business repose aussi sur ses parcs d'attraction, ses croisières et, surtout, sur ses millions de produits dérivés: les revenus issus de ces gadgets divers seront sans doute dopés par un accès large et rapide au vaste nouveau catalogue en préparation, et ce même s'il est partiellement illégal.
Le piratage peut aussi se révéler bénéfique à la logique de production des franchises. Car si telle ou telle œuvre bénéficie d'un bouche-à-oreille positif grâce à sa diffusion illégale, les fans savent que des tonnes de suites et de spin-off suivront bientôt sur les plateformes de streaming, les poussant vers un éventuel abonnement.
Le 10 décembre, Disney a ainsi annoncé une avalanche de séries Marvel et Star Wars. Par forcément une bonne nouvelle pour la créativité et la novation, mais peut-être une excellente perspective pour les actionnaires, piratage ou pas.