C'est un dossier pour le moins enquiquinant que les avocats de Tesla ont reçu, le 20 novembre, sur leur bureau. Selon une class action intentée par une clientèle mécontente, le néo-constructeur aurait feint de ne pas prendre la mesure des défauts structurels des suspensions de ses Model X et Model S produites entre 2013 et 2018. Et, pire encore, elle aurait tout fait pour dissimuler l'affaire.
Le défaut visé par la plainte est connu depuis longtemps des observateurs de la marque, mais a été particulièrement mis en lumière fin octobre lorsque 30.000 des véhicules de la marque ont été rappelés en Chine.
Selon les plaintifs et comme l'explique CNet, le défaut concerne la qualité douteuse des bras de suspensions avants et arrières des Model X et Y. Lorsque ceux-ci viennent à se briser, ce qui semble être arrivé de multiples fois, les roues commencent, tout simplement, à se détacher de la voiture, avec de possibles accidents sérieux à la clé.
«Tesla parie avec les vies et la sécurité de centaines de milliers de conducteurs et passagers dont les véhicules sont dotés de suspensions pouvant rompre de manière imminente», peut-on lire dans la plainte, qui note que plusieurs accidents importants ont déjà été liés au défaut en question.
Ce type de mésaventure n'est pas rare dans le monde automobile, où pas un jour ne passe sans qu'un véhicule ne soit rappelé par son constructeur –le site d'Auto Moto en fait même une liste, longue comme un jour sans soleil et régulièrement mise à jour. Tesla elle-même a très récemment été confrontée à une bien curieuse panne de son système d'infotainment, dûe à l'obsolescence rapide d'une simple unité de mémoire.
Dissimulation
Plus inhabituelle cependant est la manière dont Tesla a géré cette crise spécifique, et particulièrement sérieuse car questionnant la sécurité de ses autos. Sous le feu des projecteurs, sa valorisation boursière grimpant plus vite qu'un coureur du Tour de France et se défaisant peu à peu des handicaps de sa faible capacité de production, Tesla ne souhaitait sans doute pas qu'un rappel massif –et la publicité négative qui l'aurait accompagné– ne ternisse son storytelling de gloire en devenir.
Après tout, comme l'expliquait il y a peu Elon Musk, la marque que rien ne semble désormais arrêter est à plusieurs reprises passée proche de la faillite pure et simple, et un rappel massif aurait pu constituer le dernier clou de son cercueil.
Pour éviter cela, Tesla a fait les choses dans la discrétion. Elle a d'abord incriminé le style de conduite des automobilistes, plutôt que la qualité de fabrication de ses montures.
Puis, de manière furtive, elle a procédé à des rappels individuels au compte-gouttes, pour essayer de régler le problème sur quelques poignées de véhicules. Enfin, selon la plainte, elle aurait fait signer des contrats de confidentialité à certains clients, monnayant leur silence contre des réparations présentées comme de bon vouloir commercial.