Nous l'avons déjà constaté dans certains rayons de nos supermarchés, beaucoup ailleurs pourraient en perdre la vie: la guerre en Ukraine constitue une crise alimentaire mondiale majeure, et le blocus russe en mer Noire pourrait provoquer la mort par famine de millions de personnes.
La crise ne va pas aller en s'arrangeant. L'Inde, deuxième producteur mondial frappé par une canicule et une sécheresse infernales, s'est vue contrainte d'interdire les exportations de blé pour protéger sa propre population de la famine. Pire: comme aux États-Unis, les récoltes en Chine commencent elles aussi à inquiéter les experts.
Si la Russie n'est pas responsable des sécheresses et aléas qui touchent les grands producteurs mondiaux de céréales et denrées alimentaires, son rôle dans la crise est pourtant majeur.
En Ukraine, elle s'est attaquée de manière systématique aux stocks de grains comme aux équipements agricoles, volés en grand nombre, dans une attitude rappelant l'Holodomor de sinistre mémoire, famine initiée par Staline en 1932 et 1933 et responsable en Ukraine de la mort de 5 millions de personnes environ.
En outre, et peut-être surtout, elle s'est emparée des ports ukrainiens sur la mer Noire, porte de sortie naturelle de l'importante production céréalière et alimentaire de ce «grenier de l'Europe». Les conséquences de ce blocus de fait pourraient être terribles, et ce dans le monde entier.
43 millions de personnes en sursis
«Avec le blocage des routes permettant l'exportation des grains ukrainiens, le monde fait désormais face à une aggravation de l'insécurité alimentaire et de la malnutrition, et ce à un moment où 43 millions de personnes étaient déjà au bord de la famine», ont expliqué les gouvernements du G7 dans un communiqué commun.
«Nous devons nous assurer que ces céréales soient envoyés au monde. Si ce n'est pas le cas, des millions de personnes feront face à la famine», a déclaré pour sa part Mélanie Joly, ministre canadienne des Affaires étrangères.
Les pays occidentaux exigent donc de la Russie qu'elle desserre son emprise sur ces routes maritimes –ce qu'elle ne fera sans doute pas, tenant dans ces famines potentielles un levier de négociation aussi puissant que celui des énergies qu'elle utilise comme une arme.
Ils ne restent pourtant pas les bras croisés: l'Union européenne tente ainsi par tous les moyens de dévier les routes habituelles des céréales ukrainiennes afin de les faire transiter par la route et le rail et les frontières accessibles telle celle de la Pologne, et ce malgré les attaques russes incessantes sur le réseau.
Une tâche titanesque, mais qui pourrait être l'une des plus importantes pour le reste du monde depuis le début de la guerre.