Après l’attentat islamophobe de Christchurch en Nouvelle-Zélande, la vidéo filmée par le terroriste a rapidement circulé sur internet, et YouTube et Facebook ont annoncé faire tout leur possible pour empêcher la diffusion de ces images.
Facebook a indiqué avoir supprimé plus d’un million et demi de vidéos de l’attentat, en seulement vingt-quatre heures. Même situation pour YouTube, qui a également retiré de son site des millions d’images. Très exposées par leur taille et leur rôle, ces plateformes ne sont pourtant que la partie émergée de la haine en ligne: elles constituent son interface vers le grand public.
Car si la modération sur les réseaux sociaux classiques est souvent insuffisante, elle a au moins le mérite d’exister. Facebook ou Twitter, s'ils veulent garder leur base d’utilisateurs et d'utilisatrices, doivent au moins faire en sorte que leur contenu suive des règles strictes. Et il est toujours possible de faire pression sur eux pour obtenir des efforts supplémentaires.
Le réel problème se situe plus profondément, dans l'existence et la survivance de beaucoup de sites internet qui assument ne jamais modérer leur contenu, souvent sous couvert de liberté d’expression, et malgré leur implication directe dans de nombreuses violences. Les États comme les entreprises qui régissent le web semblent impuissantes à les empêcher de nuir.
La lie du web
Le lien vers le live Facebook du massacre de Christchurch a d’abord été posté sur 8chan («eight» ressemble en anglais au mot «hate», soit «haine»), un forum qui rassemble des internautes refusant toute modération. Il abrite nombre de références racistes et néonazies, misogynes et islamophobes.
Le forum était déjà lié au «pizzagate», une théorie conspirationiste qui s’était terminée par des coups de feu tirés dans une pizzeria de Washington. Des centaines de membres du forum continuent encore à ce jour à féliciter le terroriste australien.
L’année dernière, un autre terroriste d’extrême droite est lui aussi entré dans un lieu de culte, une synagogue cette fois, pour commettre un massacre antisémite. On a rapidement découvert qu’il postait régulièrement des messages sur le réseau social Gab, populaire chez les internautes d’extrême droite et qui lui aussi porte comme un étendard son absence de modération.
Après avoir été lâché par son hébergeur, Gab est finalement revenu en ligne après que le registraire de nom de domaine Epik a décidé de le soutenir. Même scénario avec le Daily Stormer, un site néonazi supprimé après le meurtre d’une manifestante antifasciste lors du rassemblement «Unite the Right» à Charlottesville en 2017. Il a finalement refait surface il y a un an.
La multitude d’entreprises fournissant un hébergement internet fait que ces sites trouveront toujours une place au chaud. En Nouvelle-Zélande, les fournisseurs d’accès internet (comme Free ou SFR en France) ont donc pris la décision de bloquer l’accès aux sites qui ne répondent pas ou refusent d’accéder aux demandes de suppression de la vidéo de l’attentat. Une solution radicale mais contournable avec un VPN –un premier pas peut-être, néanmoins.