Au Japon, les voitures ont toujours eu un style à part, tout en lignes anguleuses. Les vieux micro-vans japonais, notamment, donnent l'impression que l'on a passé un combi Volkswagen dans un compresseur de forme étroite et rectangulaire, pour obtenir un véhicule pouvant se garer sur une place de parking et faisant moins de 2 mètres de haut.
L'engin est peu pratique (car petit pour un van), peu attirant (car sans rondeurs) et peu écologique (car vieux). Pourquoi alors une communauté américaine de fans automobiles s'est-elle soudainement passionnée pour les «kei vans»?
Raison numéro un: le confinement est aux yeux de certain·es un moment idéal pour retaper entièrement un micro-van. «Ces vans représentent la liberté et l'indépendance, au moment où l'on est cloîtrés à la maison», commente pour Bloomberg Danny Hellvig, qui a fondé Vanlife Northwest en 2014.
«Esthétiquement, soit vous adorez, soit vous détestez, reconnaît-il à propos de son Toyota Hiace Super GL de 1990. Moi, j'adore à quel point il est moche.»
Raison numéro 2: une vague de nostalgie pour ces véhicules semble avoir touché les jeunes, à qui ils rappellent des souvenirs de voyages en famille. Sur le site Hagerty.com, 91% des avis sur le micro-van Toyota Hiace ont été laissés par des moins de 25 ans au cours des douze derniers mois.
«L'envie de minimalisme est très porteuse en ce moment, analyse pour Bloomberg Michael McGovern, à la tête de Roamer Northwest. Nous sommes tellement coincés dans notre culture de consommation que les gens se souviennent avec émotion de ces vieilles choses pittoresques.»
Vaste marché d'occasion
Conçus pour rouler à une vitesse limitée, les micro-vans ont été produits essentiellement dans les années 1980 et 1990 en Asie. Leurs petits noms sont évocateurs: Mitsubishi Delica Star Wagon, Toyota Hiace (à prononcer «high-ACE»), Daihatsu Hijet, Suzuki Every, Honda Life Step…
Au Japon, leur praticité et leur robustesse a d'abord convaincu les fermiers, les entreprises de livraison et la population active urbaine. Ils sont ensuite devenus un phénomène plus underground: des tuners ont commencé à les modifier pour améliorer leurs performances, leur offrir des roues disproportionnées ou faire rugir leur machinerie.
Le Japon est un pays où les régulations automobiles sont inflexibles: à l'achat, puis tous les deux ans et peu importe l'âge du véhicule, celui-ci doit subir un examen exhaustif pouvant coûter jusqu'à 2.000 euros.
Pour beaucoup de Japonais·es, le calcul est vite fait: mieux vaut abandonner son vieux micro-van et choisir un véhicule plus récent. L'archipel dispose donc d'un vaste marché d'occasion convoité par le public américain, qui a dû attendre que les modèles japonais aient 25 ans pour pouvoir les importer.