Les calandres colossales, le poids titanesque, la hauteur de porte-avion ou le sentiment de domination routière qu'offrent SUV et pick-ups sont de très égoïstes sentiments sécuritaires, que l'imposition d'un label de sécurité, souhaitée par le sénateur de l'État de New York Andrew Gounardes, espère mettre en lumière et peut-être atténuer.
Car si ces ultra-populaires gros véhicules semblent bien protéger les êtres humains qui peuplent leurs habitacles, il n'en va pas de même pour ceux qui les entourent. Ces tanks citadins et leur «front blind zone» sont notoirement désastreux en matière de sécurité pour les piétons comme pour les cyclistes.
Thanks. Perhaps you can ask your contacts at Ford why our kids here increasingly have to deal with these every day when they walk and bike to school:@schmangee @buttermilk1 pic.twitter.com/mFFQeXLc6k
— Erik (@erik_griswold) February 7, 2020
Cette menace n'est pas seulement journalistique ou sensationnaliste: elle se retrouve, noir sur blanc mais en couleur sang dans les statistiques de sécurité routière.
Comme le rappelle Bloomberg, les États-Unis ont ainsi connu en 2020 une hausse inédite de 5% des décès de piétons sur les routes, alors que le pays, confiné, roulait globalement beaucoup moins que les années précédentes: cette triste croissance est liée, est-il expliqué, à la popularité toujours croissante de ces véhicules littéralement «bigger than life».
Publiée en 2020, corroborée partout ailleurs dans le monde, une étude de l'Institute for Highway Safety explique que le risque de décès pour les piétons ou cyclistes est 46% supérieur si un accident implique un SUV ou un pick-up.
Les stickers de la honte
Pour la ville de New York et comme le note la proposition de loi d'Andrew Gounardes, les chiffres sont tout aussi éloquents: vingt-cinq des vingt-neuf cyclistes tués sur la route en 2019 l'ont été par un pick-up, un bus, un SUV ou un van –bref, par l'un des énormes engins sur roues dont les villes, pleines à craquer, pourraient sans doute se passer sans péricliter.
La loi proposée par le sénateur prévoit la création par le New York Department of Motor Vehicles d'une base de données sécuritaires des véhicules visés. Ceux-ci seraient dotés d'une note de une à cinq étoiles, qui prendrait en compte leur historique accidentogène dans l'ensemble de l'État, ainsi que d'éventuels équipements et options de sécurité.
Les concessionnaires auraient l'obligation d'afficher ce «SécuriScore» sur les véhicules mis en vente. «Nous espérons que cela contribuera à éduquer les gens sur les conséquences potentielles de leurs choix», explique le sénateur Gounardes.
Si ces petits «autocollants de la honte» ne semblent être qu'une goutte dans l'océan des mesures qu'un gouvernement pourrait prendre pour s'attaquer à la question, qui se double du surcoût environnemental de tels monstres mécaniques, les associations investies dans la prévention routière soutiennent la proposition de loi.
Elles notent que New York pourrait être l'avant-garde d'un débat plus national sur la question. Un thème de la sécurité routière à laquelle Joe Biden est particulièrement sensible: Neilia et Naomi Biden, respectivement première femme et fille du président américain, sont mortes en 1972 dans un accident de voiture qui a également impliqué ses fils Beau et Hunter.