Être observé dans la rue par l'œil d'une caméra perchée sur un poteau semble être devenu normal. Derrière elle, vous imaginez un policier à moitié endormi par l'ennui de sa tâche, assis devant un écran dans un centre situé à plusieurs kilomètres de là. Mais s'il s'agissait plutôt de votre voisin?
Contrairement à l'Asie, la surveillance en Europe ou en Amérique était généralement d'ordre public, mise en place par la police ou le gouvernement. Mais la récente démocratisation des technologies de reconnaissance faciale ou d'identification de plaques d'immatriculation permet aux particuliers de se procurer des outils de moins en moins difficiles à utiliser.
Objets connectés et logiciels d'intelligence artificielle sont en pleine irruption dans les rues résidentielles, à l'entrée des maisons ou dans les petits magasins de quartier.
Souriez, vous êtes filmé!
Des caméras qui repèrent les mouvements inhabituels ou reconnaissent les visages sont désormais inclues dans les sonnettes intelligentes. Des logiciels d'intelligence artificielle permettent de repérer des actions spécifiques comme fumer.
Il leur est aussi possible de détecter ce type de comportement en analysant, sans assistance humaine, des heures et des heures d'enregistrements dans des bases de données. Ces technologies ne coûtent souvent pas plus que quelques centaines d'euros et sont très simples à installer.
«Nous constatons une hausse de l'adoption des technologies de sécurité pour la maison dans un souci de surveillance du voisinage», remarque, pour Axios, Mana Azarmi, conseillère au Center for Democracy and Technology. «Les stalkers, les criminels et les époux suspicieux peuvent en abuser.»
L'Amérique en pointe
Aux États-Unis, à Denver, plus de dix quartiers ont acheté des lecteurs de plaques d'immatriculation pour traquer les entrées et sorties de tous les véhicules et placé des caméras qui enregistrent les visages des passants.
Dans tout le pays, des maisons sont équipées de caméras de surveillance qui alertent la police de violations des règles de voisinage, des collisions de voitures dans les parkings ou de dépôts de poubelles illégaux. Des propriétaires utilisent également ces technologies pour surveiller leurs locataires dans les milieux les plus défavorisés.
Les expert·es s'inquiètent notamment car ces bases de données privées sont plus facilement accessibles aux forces de l'ordre que les images prises par le gouvernement dans l'espace public. «La police a accès à une incroyable quantité de mouvements des Américains dans le temps et l'espace et sur, potentiellement, des années», s'inquiète Nathan Freed Wesslet, un avocat de l'Union américaine pour les libertés civiles.
Ses inquiétudes reposent désormais sur des certitudes: fin juillet, il était révélé que Ring, propriété d'Amazon, pouvait transmettre sans mandat ni question des vidéos à la police américaine.