En Chine, on sait décidément se changer les idées. Depuis le début de l'épidémie de coronavirus, le jeu vidéo de simulation de pandémie Plague Inc. est devenu l'application la plus téléchargée sur iOS et le film catastrophe coréen Pandémie (The Flu) le plus recherché sur le réseau social Douban.
Mais sur Weibo, les internautes se souviennent également de la «catastrophe du sang vicié» («corrupted blood incident»), dont le hashtag a été mentionné soixante millions de fois.
Le 13 septembre 2005, des gamers expérimenté·es de World of Warcraft ont affronté le boss nommé Hakkar l'écorcheur d'âmes, qui pouvait aspirer le sang de ses ennemi·es pour se régénérer. Pour le vaincre, il fallait utiliser sur soi-même une malédiction baptisée «sang vicié», afin que Hakkar soit contaminé par cette maladie. Or celle-ci était hautement contagieuse, en plus d'être mortelle pour les personnages de faible niveau.
Avant de quitter le donjon où Hakkar avait été battu, l'équipe de choc s'est assurée de ne plus être affectée par la malédiction, mais a oublié au passage ses animaux de compagnie. Lorsque le groupe de gamers a rejoint le reste du monde de WoW, certaines des bêtes étaient porteuses du virus.
Cyber-pandémie
Très rapidement et notamment via la téléportation, «sang vicié» s'est propagé à un million de personnages, décimant des villes entières. Le placement de zones en quarantaine par Blizzard, l'éditeur du jeu, n'a pas fonctionné.
Le comportement des internautes durant cette période, étudié par des épidémiologistes, passionne Weibo. «Des personnes se sont portées volontaires pour aider les autres mais sont tombés malades. D'autres ont vaqué à leurs occupations (gagner de l'argent en faisant le commerce d'armes, par exemple) et en ont contaminé d'autres. Et certaines se sont contaminées volontairement, par curiosité», raconte Abacus News.
Au bout d'une semaine, Blizzard est finalement parvenu à mettre fin à la catastrophe via des réinitialisations matérielles.
Les scientifiques ont relevé les similitudes entre l'épidémie de «sang vicié» et celle du SRAS en 2003: transmission de l'animal à l'homme; propagation rapide, par téléportation dans WoW et par transport aérien pour le SRAS; échec des quarantaines. Des leçons applicables au nouveau coronavirus?