L'Inde est, depuis quelques semaines, redevenue le triste épicentre de la pandémie de Covid-19. Mais alors qu'un nombre croissant de nations ferment leurs frontières aux vols en provenance de la péninsule, les Indiens et Indiennes les plus fortunés ont trouvé un moyen de fuir l'apocalypse sanitaire: affréter des jets privés et transiter par des hubs comme Dubaï.
Le 21 février, le Bharatiya Janata Party au pouvoir faisait voter une résolution louant la victoire du pays face au SARS-CoV-2 grâce au «leadership compétent, sensible, dévoué et visionnaire du Premier ministre Shri Narendra Modi».
Quelques semaines plus tard, le pays est bien loin de ces rodomontades et falsifications gouvernementales, l'administration Modi étant allée jusqu'à réclamer à Twitter la censure de tweets jugés trop critiques.
There were few crucial weeks in Feb and March when cases were just starting to rise. Let’s zoom in on these four weeks and see how the early signals were missed, valuable time was lost and Indians were led to believe that they were immune to COVID. Thread 1/n pic.twitter.com/9UeDAX1OoH
— SamSays (@samjawed65) April 23, 2021
Faisant face à un tsunami de nouveaux cas et de décès, près de 350.000 infections et plus de 2.500 morts pour le seul 25 avril, le pays voit son système sanitaire s'écrouler sous la pression, au point d'engorger, dans des scènes d'apocalypse, les crématoriums et services funéraires.
Ailleurs dans le monde, le virus «triple mutant» initialement détecté en Inde, potentiellement plus contagieux que le variant dit britannique et peut-être capable d'éroder l'efficacité vaccinale, inquiète les gouvernements qui ont été poussés à instaurer restrictions et quarantaines.
Money, money, money
Parfois tardives ou incomplètes, ces mesures ne concernent toutefois que le commun des mortels. Car comme le note The Economic Times, l'élite indienne a vite compris que l'argent pouvait tout acheter, y compris le contournement de règles mises en place pour tenter de juguler une dissémination virale inquiétante.
La demande pour l'affrètement de jets privés a ainsi été «absolument folle», a expliqué le patron d'Air Charter Service à l'AFP. «Nous avons requis plus d'avions de l'étranger pour faire face à la demande», explique quant à lui un porte-parole d'une autre de ces compagnies, Enthral Aviation.
«Affréter un vol pour treize personnes entre Mumbai et Dubaï coûte 38.000 dollars (32.000 euros), et 31.000 dollars pour un avion de six places», ajoute-t-il, parlant de quatre-vingt demandes par jour et de personnes ou familles s'organisant en groupes pour partager les frais d'un tel charter de luxe.
Dubaï est une destination logique pour ces Indiens et Indiennes fortunées: les Émirats arabes unis comptent 3,3 millions de personnes originaires de la péninsule, soit près d'un tiers de la population du petit état fédéral.
Surtout, si Dubaï a comme d'autres décidé d'imposer des restrictions aux voyageurs et voyageuses en provenance d'Inde, ces dernières ne concernent que les vols réguliers, les jet privés étant exemptés de ces règles.
Or, dans le cas de la France comme de nombreux autres pays, les EAU ne sont pas soumis aux mêmes restrictions que l'Inde, le Brésil ou l'Afrique du Sud notamment: c'est ainsi que se dévoile toute la faiblesse des dispositifs mis en place pour tenter de contenir, sans véritable stratégie globale de suppression du virus, la propagation de variants inquiétants.