Des scientifiques dans le monde entier participent à construire des interfaces homme-ordinateur capables de lire l’activité cérébrale depuis nos neurones ou d'écrire des informations directement dans le cerveau. | GôDiNô via Flickr
Des scientifiques dans le monde entier participent à construire des interfaces homme-ordinateur capables de lire l’activité cérébrale depuis nos neurones ou d'écrire des informations directement dans le cerveau. | GôDiNô via Flickr

Les implants cérébraux, une utopie (déjà) tangible

Le projet Neuralink de Musk n'est qu'une bribe de la recherche qui tente de lier l'être humain à la machine et qui achoppe sur son plus redoutable adversaire: le cerveau.

Neuralink, l'ambition la plus secrète –mais peut-être, la plus ambitieuse– d'Elon Musk veut changer l'histoire de l'humanité. Il faut dire que le projet de créer un implant cérébral capable de connecter l'être humain et la machine semble venu tout droit d'un roman de science-fiction.

Il s'agit en réalité d'un sujet de recherche aussi vieux que l'ordinateur et Elon Musk est loin d'être le premier à vouloir prendre le contrôle de notre évolution. En 2016, Wired racontait l'histoire de ces scientifiques en quête du transhumanisme. Dès 1963, un scientifique d'Oxford annonce avoir trouvé comment contrôler un projecteur de diapositives rien qu'avec les ondes cérébrales.

Peu de temps après, José Delgado, un neuroscientifique de l'université de Yale, invente un implant cérébral contrôlé par une radio qu'il appelle le «stimoceiver». Lors d'une démonstration au public en Espagne, il arrête un taureau en pleine course et lui fait rebrousser chemin en pressant simplement les deux boutons d'une télécommande reliée à l'implant de l'animal. «La race humaine est à un carrefour de son évolution. Nous allons bientôt obtenir le pouvoir de construire nos propres fonctions mentales, prédisait-il au New York Times en 1970. La question est: quel genre d'humain voudrions-nous, idéalement, construire?»

La vie rêvée des cyborgs

Des scientifiques dans le monde entier participent à construire des interfaces cerveau-ordinateur capables de lire l'activité cérébrale depuis nos neurones ou d'écrire des informations directement dans le cerveau. Nous sommes encore aux balbutiements de ces neurotechnologies. L'état des connaissances et des avancées technologiques permettent à ce jour de restaurer des fonctions motrices perdues ou à les créer chez des gens qui ne les ont jamais eues. Il est par exemple possible de contrôler une prothèse par la pensée grâce au Defense Advanced Research Projects Agence (Darpa), le département de recherche et développement du Pentagon.

Mais les équipes des recherche ont l'espoir de pouvoir ajouter des fonctions qui n'ont jamais existé pour, en quelque sorte, créer des superhumains capables de faire des choses qu'une personne normale ne peut pas faire.

Des recherches ont déjà abouti à des résultats impressionnants. Deux scientifiques de l'université de Duke aux États-Unis ont par exemple permis à des rats avec des implants cérébraux de «ressentir» les infrarouges (un peu à l'instar des chauves-souris ou des pythons).

Devenir l'ordinateur, une idée risquée

Encore mieux, «nous pourrions potentiellement décharger l'une de nos tâches à l'ordinateur (comme la vitesse de calcul, la reconnaissance d'image, les tâches répétitives)», remarque Al Emondi, programmateur de technologies biologiques chez Darpa sur Axios. L'idée serait de nous passer de nos yeux ou de nos doigts pour nous servir d'un ordinateur. «Cela permettrait d'augmenter les capacités cognitives naturelles de notre cerveau», ajoute Emondi.

Toutes ces belles promesses ne doivent pas nous faire oublier qu'implanter un objet dans notre cerveau comporte de multiples risques qui peuvent nous mener à la mort –au moins cérébrale. Pour Doug Weber, neuro-ingénieur à l'université de Pittsburgh, l'un des principaux obstacles est la date de péremption des implants eux-mêmes.

«Lorsque les scientifiques mettent des électrodes dans le cerveau, ces objets finissent par ne plus fonctionner –après quelques mois ou quelques années, explique-t-il à The Atlantic. Le problème le plus intrinsèque, ce sont les fuites de sang. Si vous répétez plusieurs fois la procédure de l'opération, on vous blesse, puis vous saignez et vous récupérez, puis on vous blesse, vous saignez, vous récupérez, etc. Chaque fois que du sang coule dans les compartiments de votre cerveau, l'activité de vos cellules diminue drastiquement. Un jour, elles tombent malades.»

Autre obstacle: le fonctionnement du cerveau. Notre organe visqueux ne progresse pas de manière linéaire comme un ordinateur, où l'action suit un chemin qui va de A vers B et C. Les programmes informatiques sont très modulaires alors que le cerveau est un gigantesque chaos: les informations y circulent dans tous les sens, simultanément. L'intégration de ce fonctionnement à des circuits informatiques est encore hors de portée.

«Hacker» le cervau en attendant du nouveau

Des scientifiques ont pourtant poussé les expériences très loin, parfois sur leur propre cerveau. Dans un article de 2016, Wired raconte l'histoire passionnante du neuro-scientifique Phil Kennedy, qui s'est fait poser un implant de sa conception par un confrère après plusieurs échecs sur des patient·es et un retrait de l'autorisation de la FDA.

Si bien que les recherches les plus prometteuses se contentent de «hacker» notre cerveau plutôt que de le coloniser. En analysant nos ondes cérébrales, nous pourrions par exemple développer des techniques d'apprentissages individualisées. Des implants pourraient également stimuler des nerfs et ainsi améliorer temporairement nos capacités de compréhension.

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