Comment sensibiliser les jeunes aux effets de la malbouffe sur leur organisme et les aider à développer un esprit critique à ce sujet? Les méthodes classiques déclinent les leçons nutritionnelles, rappellent les risques encourus, insistent sur la nécessité de pratiquer régulièrement de l’exercice physique, etc.
Pour tenter d’innover, une nouvelle méthode a été imaginée, qui s’appuie sur deux traits partagés par beaucoup de jeunes: le désir de justice et d’équité et l'appétence pour la rébellion contre l’ordre établi par les adultes. Un principe qui consiste à stimuler leur propension à l’indignation.
Sur 350 élèves de 4e sélectionné·es dans l’État du Texas, la moitié a suivi les enseignements nutritionnels habituels; l’autre moitié a été sensibilisée à la manière dont l’industrie agro-alimentaire produit en masse de la nourriture de mauvaise qualité très addictive en l'enrobant d'un marketing ciblé afin de convaincre les enfants d'abord, et les classes populaires ensuite, d'acheter ses produits. Une clarification assortie d'une précision: le but visé par cette industrie est de s’enrichir à leur détriment.
Le premier groupe a ensuite participé à un jeu où il fallait trouver le temps nécessaire pour brûler les calories apportées par différents aliments. Le deuxième groupe, lui, jouait à un jeu appelé «Make it true» qui consiste à gribouiller sur des affiches publicitaires pour révéler la face caché des produits mis en avant.
«Drake le fait pour l’argent»
Cette méthode d’apprentissage reprend les conclusions d'une expérience identique testée en 2016 –excepté pour la partie ludique. Et qui avait fait ses preuves puisque, immédiatement après, les scientifiques ont constaté que les élèves sélectionnaient des options plus saines au self de leur école.
Si ce nouveau protocole a été enrichi d'un aspect ludique, c'est pour développer l'esprit critique des enfants. «Au lieu de voir ces publicité comme des tentations, elles servent de rappel que l’industrie agro-alimentaire essaye de les manipuler, eux et d’autres catégories vulnérables», détaille Christopher Bryan, le directeur de l’étude. L'équipe vérifie ainsi qu'elle obtient bien l’effet inverse de celui atteint par les publicitaires.
Et cela semble fonctionner puisque les élèves deviennent très critiques face aux réclames de l'industrie agro-alimentaire: l’un d'entre eux a par exemple recouvert une pub Doritos en y écrivant le mot «diabète», quand un autre barrait une pub Sprite mettant en scène le rappeur Drake avec l’inscription «il le fait pour l’argent» et d’un phylactère «en vrai je n’aime pas ça», etc.
Après l’expérience, les garçons du groupe expérimental ont réduit leur consommation de soda et de friandises de 31%. Les filles des deux groupes ont réduit leur consommation: «L’éducation traditionnelle mentionne beaucoup les calories, ce qui peut influencer les filles qui dès cet âge-là, subissent déjà des fortes pressions à la maigreur», conclut Bryan.