C'est à quelques kilomètres de Turin, dans le charmant petit village de San Maurizio Canavese, qu'Achille et Giambattista Judica-Cordiglia installent leur station, baptisée «Torre Bert» et avec laquelle ils captent les communications des vaisseaux spatiaux survolant la région.
Aidés par une quinzaine de personnes, dont leur sœur Maria Theresa qui a le grand avantage de parler le russe, nos radioamateurs se branchent en direction des étoiles.
À l'époque, c'est un passe-temps prisé de la jeunesse, comme le rappelle le journaliste J. D. Ratcliff lorsqu'il fait le compte-rendu de sa visite à Torre Bert en avril 1965. «Comme les premiers radioamateurs, ces talentueux enthousiastes ont construit, pour l'équivalent de quelques centaines de dollars, leur propre équipement, conçu avec de la ferraille: grillage de basse-cour, tuyaux usés et vieilles radios.»
Le secret soviétique
Parmi les nombreux messages captés par les deux frères figure un étrange S.O.S., en date du 28 novembre 1960. Plus tard, une conversation entre un homme et une femme dont le vaisseau ne cesse de ralentir et qui comprennent avec effroi que «le monde ne saura jamais rien d'eux».
Le 23 mai, une cosmonaute répondant au nom de Ludmilla se plaint de l'intense chaleur qui règne dans son cockpit et demande à ce que l'on procède à un atterrissage d'urgence, avant que la communication ne se coupe subitement…
Ces écoutes donnent du crédit à la thèse des cosmonautes fantômes. Il faut dire qu'à l'époque, le culte du secret règne en URSS où le dirigeant du programme spatial, Sergueï Korolev, vit dans l'anonymat sur la base de Baïkonour et dont l'identité ne sera dévoilée qu'après sa mort.
La localisation du cosmodrome est quant à elle tenue secrète (les autorités auraient fourni des coordonnées erronées à la Fédération aéronautique internationale), ce qui n'a pas empêché les États-Unis de découvrir l'emplacement du site grâce à leurs satellites espions.
Affirmation la plus incroyable liée à la théorie des cosmonautes fantômes: le premier homme à être allé dans l'espace ne serait pas Youri Gagarine, mais Vladimir Iliouchine qui aurait pris place à bord du Vostok le 7 avril 1961 (soit cinq jours avant Gagarine). À la suite d'une erreur technique, le cosmonaute aurait dévié de sa trajectoire pour atterrir en Chine, où il aurait été fait prisonnier.
Trop beau pour être vrai
Difficilement recevables d'un point de vue technique, les observations des frères Judica-Cordiglia sont fortement remises en cause par la communauté scientifique.
La possibilité d'entendre si distinctement les communications à l'intérieur d'un vaisseau spatial avec leur équipement de fortune semble en effet peu crédible. De plus, dans les enregistrements qui auraient circulé à une époque sur le net sans que leur authenticité ne soit jamais démontrée, les cosmonautes russes feraient beaucoup de fautes de grammaire et de vocabulaire.
Achille, qui a ensuite mené une carrière de cardiologue, est décédé en 2015. Son frère, Giambattista, toujours en vie, aurait quant à lui joué un rôle de consultant technique sur des écoutes téléphoniques initiées par la police italienne lors d'enquêtes criminelles.