Un synthétiseur au soleil couchant. | Christian Spies via Unsplash
Un synthétiseur au soleil couchant. | Christian Spies via Unsplash

Qu'ont J.Lo, les Smiths, Britney Spears, Bruno Mars et Peter Gabriel en commun?

Ils doivent tous quelque chose à Igor Stravinsky, via le Fairlight CMI, «mère de tous les samplers».

En écoutant la chanson «Finesse» de Bruno Mars, la productrice Estelle Caswell remarque un drôle de son, semblable à un coup de klaxon, qui lui rappelle vaguement quelque chose. Une petite exploration de ses playlists Spotify lui enseigne qu'on le retrouve également chez Janet Jackson ou son frère Michael. Mieux encore, il traverse toute la décennie 1980: de Eurythmics à Matronix en passant par Duran Duran, les Smiths, Keith Sweat, Yes ou encore Prince.

La Sherlock Holmes du sample

Partie en quête de ce mystérieux bruit, Estelle Caswell découvre qu’il s’agit d’un «orchestra hit». Quésaco? Un effet sonore obtenu en superposant plusieurs bandes d’instruments, que l’on trouve notamment sur les synthétiseurs, ce qui explique pourquoi il est si présent dans les tubes des eighties. Celui sur lequel la productrice se penche n’est pas n’importe lequel: il est le tout premier jamais créé.

Pour le comprendre, il faut remonter à 1976 et à l’invention par les Australiens Peter Vogel et Kim Ryrie du Fairlight CMI, le synthétiseur mythique des années 1980, à l'origine d'une vraie révolution musicale: pour la première fois, il devient possible de sampler et de séquencer tous les sons.

Les échantillons créés ont beau ne durer que quelques secondes tout au plus, quand ils sont joués au clavier par les doigts de Stevie Wonder, Kate Bush ou Peter Gabriel, ils font des merveilles. Le musicien britannique, fondateur du groupe Genesis, passe pour être son tout premier utilisateur, mettant à profit les fonctionnalités révolutionnaires de l’appareil pour créer son propre catalogue de sons.

Peter Vogel, accompagné du compositeur Michael Carlos, offre une démonstration de son joujou à la télévision australienne, en 1976.

Le Fairlight CMI est lui-même vendu avec une bibliothèque «par défaut». On y trouve différentes tonalités, bruits de crissements, babils de bébés, etc. Et un son, nommé «ORCH2.VC.» et qui n’est autre que ce fameux orchestra hit si abondamment utilisé dans les tubes des années 1980.

Contacté par Estelle Caswell, Peter Vogel se rappelle de sa création «accidentelle». Alors qu’il cherchait un nouveau son à enregistrer sur le synthétiseur, le premier vinyle «qui lui tombe sous la main» est un enregistrement de l’Oiseau de feu de Stravinsky. Voilà comment cet opéra, avant-gardiste en son temps et donné pour la première fois à Paris en 1910, s’est retrouvé samplé ad nauseam soixante-dix ans plus tard.

D’après Caswell, on peut l'entendre pour la toute première fois sur le tube Planet Rock du groupe Afrika Bambaata, pionnier du hip-hop dont l’influence marquera les années 1980 et lancera la mode de l’orchestra hit. Dès lors, chaque marque de synthétiseur en proposera sa propre version.

Afrika Bambataa & The Soulsonic Force, clip de Planet Rock

Si son utilisation s’est peu à peu essoufflée à la fin de la décennie, l’orchestra hit fait cependant quelque apparitions remarquées lors de celle qui suivra, notamment chez les Backstreet Boys, J.Lo ou encore Britney Spears, dans son tube Lucky.

Estelle Caswell retrace, en vidéo, l'histoire de ce fameux «Orchestra Hit».

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