L'industrie hollywoodienne est, à raison, perçue comme un formidable instrument du soft power américain. Son influence sur la culture globale est indéniable et place les États-Unis à l'épicentre esthétique, thématique voire moral de milliards d'existences.
On recense quelques exceptions. Ces poches de résistance ont pour nom la France, l'Inde et le Nigeria (pour ne citer que ces pays). Leurs productions cinématographiques ne rayonnent cependant pas autant que le Soldat Ryan, Avatar ou Blade Runner.
Diffuser tous azimut
Comme le note Axios, Netflix est peut-être en train de changer profondément la donne. La plateforme de streaming est une firme américaine, mais elle vise l'ubiquité. Si elle produit à la chaîne et sans compter quantités de films et séries 100% Stars and Stripes, elle investit également une partie importante de ses fonds, pour son intérêt, dans des productions locales –une tendance qui s'est accentuée ces douze derniers mois.
Si certains de ces programmes originaux semblent réservés aux marchés des pays dans lesquels ils ont été produits, d'autres bénéficient d'une diffusion internationale –avec ou sans doublage ou sous-titrage, l'anglais étant un vecteur commun souvent suffisant.
La Casa del Papel, Suburra, le mastodonte SF chinois The Wandering Earth (huitième plus gros carton de 2019 dans son pays), la série allemande Dark, le programme français Marseille, des fictions turques, argentines, brésiliennes, japonaises ou coréennes peuvent ainsi être diffusées autour du monde de manière plus directe et instantanée qu'en empruntant les circuits traditionnels du cinéma et de la télévision.
Conscient de son rôle international, Netflix joue le jeu en faisant tout pour que ses réalisations, d'où qu'elles proviennent, soient mises en lumière. Cherchant à tout prix à lui offrir un Oscar du meilleur film, elle a dépensé, selon Vulture, 60 millions de dollars (54 millions d'euros) dans la campagne de promotion du Roma d'Alfonso Cuarón –quatre fois plus que son budget de production, établi à 15 millions de dollars.
En VO pour tout le monde
L'entreprise souhaite également changer les habitudes de visionnage du public américain, qui ne goûte guère les versions non anglophones, en diffusant des fictions dans la langue d'origine de leur pays de production.
«L'endroit d'où vous venez ou la langue que vous parlez n'a pas d'importance, tout repose sur le storytelling», a expliqué le chef de produit Greg Peters lors d'une rencontre à Lisbonne. «Les abonnés de Netflix partout dans le monde veulent une narration authentique et sont en demande d'un créateur passionné ancré dans la culture locale.»
Si l'empire culturel hollywoodo-américain reste solide, ces cultures locales ainsi que les législations qui cherchent à les soutenir, notamment par l'imposition de quotas, ont trouvé en Netlix une précieuse alliée.