On connaît bien la fachosphère, mais moins la «manosphère», bien que les deux aient partie liée. Ce terme désigne la communauté virtuelle des masculinistes, c'est-à-dire des militants antiféministes revendiquant ouvertement leurs haine des femmes et présents notamment sur Reddit.
Plusieurs chapelles plus ou moins radicales coexistent, des MGTOW (Men Going Their Own Way, Les hommes qui tracent leur propre voie) aux Incels (involuntary celibates, les célibataires involontaires), lesquels sont associés à plusieurs attentats.
Selon Wired, si ces communautés sont «relativement» petites –pas plus de 100.000 membres sur les subreddits les plus importants– leur capacité de nuisance est élevée, que ce soit dans la dissémination de la haine misogyne, le harcèlement en ligne ou les passages à l'acte violents. En revanche, les ressorts de leur activisme demeurent relativement méconnus.
Mais la science s'intéresse de plus en plus au phénomène, notamment dans une étude récente où une équipe de recherche a analysé 6 millions de posts sur Reddit.
Une misogynie toujours plus extrême
La principale conclusion de celle-ci consiste en une radicalisation du discours masculiniste sur Reddit. Alors qu'il parlait principalement de santé mentale masculine et de garde alternée en 2011, une étude des posts publiés dans les cinq années qui ont suivi ont montré qu'il insiste à présent sur la «privation» de sexe et d'affection que subiraient les hommes –élément central du discours incel– ainsi que leur «oppression» par les femmes. Surtout, il est davantage associé à des propos violents, racistes et homophobes.
Des différences apparaissent également entre les différentes communautés masculinistes. Le subreddit r/MGTOW est celui qui parle le plus de violence; r/Braincels apparaît comme le plus homophobe et le plus attaché à un patriarcat traditionnel; r/TruFemcels, étonnant pendant féminin des Incels, serait le plus raciste même si leurs propos sont plus ambigus.
Selon Wired, le principal intérêt de ce travail scientifique consiste à démontrer de façon irréfutable, notamment grâce à son approche quantitative, la prévalence de l'activisme antiféministe et le durcissement de son discours.
L'étude devrait aider les autorités à prendre conscience d'un phénomène encore méconnu du grand public et à agir contre la radicalisation, en particulier celles des hommes jeunes. D'après un article de The Atlantic, qui cite plusieurs chercheurs et chercheuses, la haine des femmes et l'antiféminisme sont une porte d'entrée vers la droite radicale.