Plus d'une cinquantaine de décès et une panique mondiale: la crise américaine de la vape a mis la cigarette électronique sous haute pression. Chargés d'enquêter, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) ne mettent pourtant pas en cause la pratique elle-même, plutôt son mésusage.
Selon les scientifiques de l'agence américaine, la vague de maladies pulmonaires ayant affecté au total plus de 2.500 personnes n'a pas été causée par les produits habituels de l'e-cig mais par l'inhalation d'acétate de vitamine E, mélangé à du THC (le principe psychotrope du cannabis) dans des cartouches pirates.
C'est une réminiscence 2.0 de l'ère du moonshine et du bootlegging, de la production d'alcool de contrebande lors de la Prohibition: les liqueurs alors consommées pouvaient se révéler être de véritables poisons –c'est d'ailleurs toujours le cas aujourd'hui.
Aux États-Unis, les problèmes de la vape n'ont pas commencé avec cette crise sanitaire. Grâce à des pratiques marketing offensives à destination des jeunes, Juul est devenu un tel phénomène chez les ados que beaucoup ont développé une forte dépendance à la nicotine.
Dans certains pays, la réponse publique à ces inquiétudes est proche de celle que les gouvernements choisissent en période de prohibition: une surtaxation parfois importante, un durcissement de la réglementation, voire une interdiction pure et simple, comme en Inde, au Brésil, en Uruguay ou à Singapour.
Aide au sevrage
Pourtant, ces taxes et interdictions tendent à pousser les personnes anciennement fumeuses qui s'étaient tournées vers la cigarette écectronique et sont encore dépendantes à la nicotine à reprendre la cigarette traditionnelle, toujours responsable de 8 millions de décès annuels dans le monde.
Ce qui semble être du pur bon sens a été confirmé par une récente étude du Bureau américain de recherche économique analysant le cas du Minnesota, où les produits de la vape sont taxés à hauteur de 95%.
Les conclusions sont limpides: la baisse du nombre de fumeurs et de fumeuses a largement ralenti dans le Minnesota, alors qu'elle se maintient à un rythme plus élevé dans les autres États n'imposant pas si lourdement la vape. Du fait de la taxe de 95%, ce sont quelque 32.400 personnes qui continueraient à fumer du tabac dans l'État de l'Upper Midwest quand elles auraient pu arrêter ou passer à la vape.
Malgré les mises en garde de l'OMS et les réticences des autorités françaises, certaines institutions continuent de voir en l'e-cig une arme utile pour lutter contre les ravages du tabac. Au Royaume-Uni, le service national de santé (NHS) ne fait pas mystère de son soutien à la vape pour arrêter de fumer.
En France, l'Académie nationale de médecine a souhaité, face à la polémique, rappeler sa position et «prévient qu'il ne faut pas se tromper d'ennemi». Selon Santé publique France, 700.000 Français·es auraient décroché du tabac combustible grâce à la cigarette électronique.