Trafiquer les nuages pour sauver la Grande Barrière de corail? Comme l'explique Wired, c'est le projet très sérieux de chercheurs du département de sciences marines de l'université Southern Cross en Australie.
Avec l'augmentation des températures de l'eau, la pollution et la surexposition aux rayons du soleil, les coraux rejettent les algues vivant sur eux, et perdent ainsi leur couleur. Ils blanchissent, avant de se laisser mourir.
Selon une étude sortie dans Current Biology, seulement 2% du plus grand récif corallien du monde a échappé au phénomène de blanchissement depuis le premier grand épisode survenu en 1998, même s'il existe des moyens pour le revitaliser. Et ce n'est pas la première fois que l'on essaye de le sauver.
Mais alors pourquoi toucher aux nuages influerait sur la santé des coraux? Parasols naturels, les nuages réfléchissent une partie de la lumière du soleil avant même qu'elle n'atteigne la Terre.
Dans le genre, les stratocumulus marins sont particulièrement efficaces: présents à basse altitude, épais, ils couvrent en permanence 20% de la zone océanique tropicale et refroidissent l'eau. Plus ils sont blancs et dodus, plus ils réfléchissent la lumière.
C'est donc là qu'arrive l'idée. Pourquoi ne pas modifier les propriétés physiques des nuages au-dessus de la Grande Barrière de corail pour qu'ils bloquent encore plus la lumière du soleil?
Moins de lumière, donc moins de réchauffement, donc moins de coraux détruits. Le tout, en faisant appel à la géo-ingénierie, un ensemble de techniques visant à effectuer des manipulations sur le climat, pour faire pleuvoir dans le désert par exemple.
Coup de poker climatique
La technique derrière le concept est finalement assez simple: il s'agit de pulvériser des milliards de cristaux de sel nanoscopiques à l'aide de buses à haute pression, depuis un bateau, vers le ciel.
Ces particules salines se retrouvent ensuite en suspension dans l'atmosphère, condensent l'humidité et créent des petites gouttelettes de nuage super réfléchissantes. Seul bémol, il faudrait répéter l'opération à chaque coup de chaud.
Des tests ont donné des résultats suffisamment enthousiasmants pour convaincre la communauté scientifique et le gouvernement australien. Via son «Reef restoration and adaptation program», il a alloué en 2020 un budget de 93 millions d'euros pour le développement de technologies permettant de sauvegarder le corail, dont celle pour blanchir les nuages.
Néanmoins, le projet n'est pas sans risques: on ne connaît pas encore les effets à long terme sur le climat de ces essais expérimentaux. L'éclaircissement des nuages pourrait par exemple considérablement modifier les pluies dans les zones alentour.
Autre problème: de tels plans de sauvegarde entretiennent l'idée que l'on peut encore stopper le réchauffement climatique sans changer nos modes de vie. Pourquoi arrêter notre dépendance aux énergies fossiles s'il suffit de bricoler les nuages pour régler le problème?