Comment les sites pornographiques, sur lesquels sont déposés chaque jours des heures et des heures de contenus, y compris amateurs et pouvant être uploadés par n'importe quel internaute, peuvent-ils s'assurer qu'ils n'hébergent pas de photos et vidéos illégales?
Le fait que les sites pornos sont remplis de revenge porn, de femmes manipulées, de viols et de pédo-pornographie est un secret de polichinelle. Et les témoignages sont suffisamment réguliers pour que les sites en question le sachent –les problèmes, pourtant, demeurent.
Le sujet fait dernièrement plus de bruit que d'habitude, après que le New York Times a publié plusieurs témoignages de femmes traumatisées par leurs sévices publiés et monétisés par Pornhub. La plateforme a supprimé des millions de vidéos mais continue de jouer l'ignorance.
Une enquête de Vice News Allemagne indique que les pratiques de modération laxistes ne concernent pas que Pornhub et le géant Mindgeek qui se trouvent derrière. Les journalistes de Vice se sont inscrits comme modérateurs bénévoles sur xHamster, un autre site porno très populaire.
Les contenus uploadés sont visualisés au préalable par des membres de la «communauté» xHamster. Bénévole, cette centaine de personnes ne reçoit aucune formation: elles doivent simplement être inscrites depuis plusieurs mois et avoir déjà publié sur le site.
Présomption de légalité
Leur rôle consiste à accepter ou refuser une photo (d'après Vice, les vidéos sont traitées par des employé·es payés) selon plusieurs critères éliminatoires, dont la violence ou la présence de mineur·es, mais aussi de contenu sous copyright, par exemple. Seulement, les règles de modération semblent beaucoup plus inquiètes d'un éventuel refus par erreur que d'une photo illégale validée.
Le manuel fourni aux modérateurs précise ainsi: «Ne supprimez aucun contenu si vous n'êtes pas à 100% sûr qu'il est illégal». Par exemple, afin de déterminer si une personne est mineure, la modération doit vérifier si «l'âge légal de la personne pose question, avec une haute probabilité d'être sous 18». Un simple doute ne suffit donc pas.
Le manuel bannit évidemment «le viol, la violence, le sang» mais précise n'interdire que «les pleurs réels, les étranglements réels». Comment savoir si des larmes ou un étranglement sont réels? Ce n'est pas expliqué.
Cette présomption de légalité s'applique aussi aux vidéos voyeuristes. Caméra cachée, cabines d'essayages, images capturées sous une jupe… les modérateurs ne reçoivent pas de contre-indication.
Une photo n'est supprimée que si elle est refusée par plusieurs modérateurs. Seulement, une fois acceptées, xHamster refuse d'expliquer ce que ces photos deviennent, et si il existe une re-modération professionnelle systématique avant leur publication.