Vue de Latamné, le 22 mars 2017. | Omar Haj Kadour / AFP
Vue de Latamné, le 22 mars 2017. | Omar Haj Kadour / AFP

Quand les outils numériques dévoilent des crimes de guerre

Grâce à une enquête open source, le site Bellingcat révèle l'implication probable de trois officiers syriens dans une attaque chimique en 2017.

L'utilisation d'armes chimiques par le régime de Bachar el-Assad, principalement le sarin et le chlore, est très bien documentée depuis des années, malgré les théories du complot diffusées par son allié russe à ce sujet.

Dans son premier rapport publié le 8 avril, l'équipe d'enquête et d'identification (IIT) de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) conclut à une probable responsabilité du gouvernement syrien dans trois bombardements chimiques sur la ville de Latamné en mars 2017.

L'une de ces attaques, au chlore, a eu lieu le 25 mars vers 15 heures, heure locale. Une vidéo diffusée par l'agence de presse officielle du régime, SANA, montre la présence de trois officiers syriens à proximité de Latamné ce jour-là, dans un poste de commandement.

Parmi eux, le général Ali Abdallah Ayyoub, depuis promu ministre de la Défense, et Souheil al-Hassan, commandant des «Forces du Tigre», déjà incriminées dans des attaques chimiques par hélicoptère.

Si la vidéo de l'agence SANA a été mystérieusement supprimée depuis, l'ONG Syrian Archive en a conservé une copie, que le site d'investigation Bellingcat a pu analyser.

Des ombres et une montre

Nick Waters, l'auteur de l'article, a commencé par repérer des éléments distinctifs de l'endroit filmé: «une route allant d'est en ouest, un talus au nord, une jonction en T à l'est et une structure en béton du côté nord de la route.»

Le journaliste s'est ensuite servi de Google Earth pour situer la scène: un seul emplacement à proximité du poste de commandement rassemblait ces éléments. La géolocalisation permet également de s'apercevoir que les officiers regardent en direction de Latamné à certains moments de la vidéo.

Nick Waters / Bellingcat

Mais de quelle heure à quelle heure les officiers étaient-ils présents? Pour le déterminer, Nick Waters a analysé les ombres visibles sur la vidéo. Il a ensuite utilisé SunCalc, un outil capable de simuler la position du Soleil et les ombres associés n'importe où dans le monde, à n'importe quelle heure.

L'analyse des ombres des soldats pointe vers un horaire situé entre midi et 14 heures. Celle des ombres des bâtiments, sur une partie de la vidéo montrant des images filmées par un drone –en supposant qu'il ait bien filmé en direct–, donnent un résultat beaucoup plus précis: autour de 14h15.

Nick Waters / Bellingcat

La vidéo recèle un autre indice: la montre du général Ayyoub, qui semble approximativement indiquer 13h15. Le recours à Topaz pour rendre l'image plus nette et la comparaison avec une montre similaire confortent ce résultat.

Nick Waters / Bellingcat

Les officiers étaient donc en train d'assister à des bombardements sur Latamné, visibles sur les images, trente minutes à deux heures avant l'attaque chimique de 15 heures, même si la vidéo ne les montre pas en train de l'observer.

«Compte tenu du temps requis pour les vérifications avant le décollage [depuis l'aéroport militaire de Hama] et le chargement des munitions, il semble probable que cette visite ait donc eu lieu alors qu'une attaque chimique était en préparation sur la ville que les généraux étaient justement en train d'observer», conclut Nick Waters.

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