Les cryptomonnaies, qui permettent de rester anonyme et d'effectuer des transactions en dehors du système bancaire sont du pain béni pour les guérillas militantes de tout bord. Les réseaux djihadistes en particulier, observés de très près par les services de renseignement du monde entier, trouvent un intérêt croissant pour ce mode de financement.
Bien que souvent présentées comme intraçables par ces groupes, les cryptos font l'objet d'une attention renforcée des services antiterrorisme. En France, vingt-neuf personnes impliquées dans une filière de financement du djihadisme par cryptomonnaie ont été arrêtées en septembre 2020.
Seulement, les djihadistes apprennent vite. Hayat Tahrir al-Cham («Organisation de libération du Levant» en français), qui fait partie de la rébellion syrienne, est particulièrement enthousiaste vis-à-vis des cryptos.
Ce groupe, qui contrôle la ville d'Idleb, a par exemple publié une vidéo affirmant que l'utilisation de bitcoins peut respecter la charia, et a déjà fait référence au bitcoin en tant que «monnaie de l'économie du futur».
VPN et spéculation
Selon une enquête de Wired, les groupes djihadistes ont appris à couvrir leurs traces en utilisant des VPN et en diversifiant leur porte-monnaie avec de multiples cryptos différentes. À Idleb, Bitcoin Transfer, une enseigne qui propose d'acheter des cryptos contre du cash, a diversifié ses opérations et utilise maintenant Tether, une crypto plus stable puisqu'elle est indexée sur le dollar américain.
Des dizaines de groupes Telegram, dont plusieurs en anglais visiblement destinés aux sympathisants occidentaux, donnent des conseils de trading et expliquent comment échanger anonymement et contourner les contrôles d'identité.
Tous les bitcoins envoyés au Moyen-Orient ne servent pas à financer le terrorisme. Dans nombre de pays, l'envoi d'argent en Syrie est illégal. Les cryptos peuvent donc constituer un moyen pour les civils de faire parvenir de l'argent à leur famille.
L'ascension vertigineuse des cryptos pendant la pandémie, en contraste avec la livre syrienne, qui a atteint son plus bas historique début mars, offre aussi une manière de se faire un peu d'argent en spéculant, relate l'Observatoire syrien des droits de l'homme.
Cela vaut pour les civils comme pour les combattants. D'après des messages que Wired a pu consulter dans un canal Telegram, Hayat Tahrir al-Cham souhaite même créer une branche dédiée aux cryptomonnaies, et y recruter des civils.