Quel peut bien être le lien entre l'eau potable et la crise du Covid? Réponse: l'oxygène. Fin août, la station de traitement de Tampa Bay en Floride a annoncé qu'elle ne disposait plus de suffisamment d'oxygène liquide, utilisé pour décontaminer l'eau.
Avec plus de 17.000 patients hospitalisés dans l'État, l'oxygène est en effet réquisitionné en priorité pour les personnes nécessitant une assistance respiratoire, rapporte Wired. Conséquence: le maire d'Orlando a appelé les habitants à limiter leur consommation d'eau.
«À l'échelle nationale, la demande en oxygène liquide est extrêmement élevée, car elle doit servir en priorité à sauver des vies, écrit Buddy Dyer dans un message Facebook. Si nous ne réduisons pas immédiatement la quantité d'eau à traiter, cela pourrait avoir des conséquences sur sa qualité.»
Le service de l'eau de la municipalité a lui aussi publié un avis recommandant d'arrêter d'arroser sa pelouse, de laver sa voiture et d'autres usages «non essentiels» afin d'économiser suffisamment de ressources en oxygène pour les patients hospitalisés.
La station de traitement de Tampa Bay requiert sept à neuf camions-citernes d'oxygène liquide par semaine, à la fois pour désinfecter l'eau et pour supprimer ses mauvaises odeurs lorsqu'elle coule du robinet.
La pelouse ou le vaccin?
«L'oxygène liquide est l'un des désinfectants les plus puissants au monde dans l'industrie de l'eau», assure Brandon Moore, porte-parole de Tampa Bay Water. Selon Air Liquide, en substituant de l'oxygène pur à l'air (qui contient seulement 21% d'oxygène), on améliore de 50% la capacité de traitement.
Environ 20% des patients atteints de Covid nécessitent une mise sous oxygène. Pour une déficience de saturation modérée, où l'oxygène est administré via un tube dans les narines, environ 1 à 6 litres par minute sont nécessaires (1 litre d'oxygène liquide correspond à 800 litres d'oxygène gazeux).
Mais, avec le Covid, «on observe des pneumonies très hypoxémiantes, c'est-à-dire que le manque d'oxygène dans le sang est très important», explique le docteur Gérald Choukroun, chef de service réadaptation post-réanimation à l'hôpital Forcilles (Seine-et-Marne).
Durant la deuxième vague, on a développé de nouveaux dispositifs d'oxygénation permettant de limiter le recours à l'intubation. «Avec cette méthode d'oxygénothérapie à haut débit, on peut alors grimper jusqu'à 70 litres d'oxygène par minute et par patient», calcule le médecin. Ce qui représente plus de 100.000 litres d'oxygène par jour, soit quatre bonbonnes de 30 litres. Multipliez par le nombre de patients, et vous comprendrez l'ampleur de la pénurie.
Mis à part les restrictions d'eau, l'autre moyen de réduire la pression sur la demande d'oxygène, c'est d'aller se faire vacciner, conclut Buddy Dyer dans son message Facebook. Entre le vaccin et la pelouse, le dilemme s'annonce cornélien.