Le patron, sur le front. | Dmitri (Wartranslated) via Twitter
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Bakhmout, le crépuscule de Wagner en Ukraine?

Le Kremlin se servirait de la sanglante bataille pour affaiblir le groupe d'Evgueni Prigojine, et l'Ukraine tient.

Il semble que l'ambiance reste au très gros temps et aux très sales coups entre le ministère russe de la Défense –en particulier son patron Sergueï Choïgou et le chef des opérations en Ukraine Valeri Guerassimov– et le groupe Wagner d'Evgueni Prigojine.

Nous rapportions il y a quelques semaines comment ce dernier, «comme Icare» pour reprendre l'expression de l'un de ses proches, s'était senti trop beau et avait grimpé trop haut, se piquant d'ambitions politiques fortes, avant de risquer une chute possiblement brutale.

Dans une note publiée dimanche 12 mars, l'Institute for the Study of War, un cercle de pensée basé à Washington dont les décryptages sont très suivies, est allé plus loin encore dans cette analyse.

Selon l'organisme, la très sanglante bataille de Bakhmout, que les autorités ukrainiennes décrivent elles-mêmes comme le «dernier combat» en Ukraine du groupe Wagner, est consciemment utilisée par Shoïgu et Gerasimov comme un moyen de se débarrasser de leur rival Prigojine.

«Le ministère russe de la Défense –et en particulier le ministre Sergueï Shoïgu et le chef d'État-major Valery Gerasimov– semblent se saisir de l'opportunité pour délibérément user à la fois les troupes d'élite et les détenus envoyés au front par le groupe Wagner à Bakhmout, dans un effort pour affaiblir Prigojine et perturber ses ambitions d'influence au sein du Kremlin», est-il ainsi écrit dans le rapport du think tank américain.

Main dans la main contre leur nouvel ennemi commun, Shoïgu et Gerasimov l'obligeraient ainsi à engager le gros des forces de Wagner présentes en Ukraine dans une tentative désespérée de prendre la ville de l'est de l'Ukraine. Proche de l'effondrement mais tenant toujours, Bakhmout est, depuis des mois, le lieu d'une bataille sans pitié que l'Ukraine et son commandement militaire et politique se refusent à lâcher.

Depuis quelques semaines, dans diverses vidéos ou messages audio diffusés sur les réseaux sociaux et canaux officiels de Wagner, la rivalité entre les deux camps n'a cessé de gagner en amertume, puis en violence. Evgueni Prigojine ne cesse ainsi de se plaindre d'une «famine de munitions» provoquée par le commandement russe et qui coûterait très cher à ses troupes.

À l'usure, des deux côtés

Celles-ci, constituées pour partie de dizaines de milliers de criminels sortis des prisons russes, avec l'aval à l'époque de Vladimir Poutine, se réduiraient donc comme peau de chagrin, à mesure que les charniers se remplissent autour de Bakhmout et sous l'œil soulagé de Shoïgu et Gerasimov.

Fin février, il était ainsi avancé que le groupe Wagner était ainsi déjà privé de 80% de ces 50.000 prisonniers. Une masse que Prigojine ne peut plus reconstituer. Se disant désormais «coupé de Poutine», il a été expressément interdit de ces recrutements carcéraux. Le ministère russe de la Défense les pratique désormais lui-même, avec des résultats tout aussi terribles, et Wagner en est réduit à aller recruter sa chair à canon dans les écoles russes.

L'odeur de sainteté de Prigojine à Moscou a donc aujourd'hui la forte et âcre odeur du pourri. Le même Institute for the Study of War notait ainsi le 13 mars que les élucubrations du patron de Wagner, qui récemment «plaisantait» sur le fait de se présenter à la présidence de l'Ukraine, avaient du mal à passer auprès de certains caciques du Kremlin.

Dans une charge sans pitié, le politologue Aleksey Mukhin voit par exemple dans ces rodomontades une réaffirmation des ambitions présidentielles russes du patron de Wagner, ainsi qu'un écran de fumée destiné à dissimuler son échec à prendre complètement Bakhmout.

Mais si le groupe Wagner s'use sur Bakhmout, qui pourrait signer le début de la fin de son poids important dans l'«opération spéciale» russe en Ukraine, il n'est pas le seul à souffrir. Comme nous l'indiquions il y a peu, l'attrition totale de cette bataille est également une effroyable machine à briser les soldats ukrainiens.

«En moins d'une semaine, depuis le 6 mars, nous avons réussi à tuer plus de 1.100 ennemis dans le seul secteur de Bakhmout, des pertes irréversibles pour la Russie», expliquait le président Zelensky dans une vidéo récente. Pourtant, les pertes sont également très importantes du côté ukrainien, et des doutes commencent se faire jour.

En continuant à envoyer coûte que coûte de nouvelles troupes dans le chaos de Bakhmout, Kiev n'est-elle pas en train d'user les réserves dont elle aura besoin pour la grande contre-offensive annoncée pour le printemps?

Un article du Washington Post est ainsi assez cru sur les difficultés croissantes propres aux armées de Kiev. Les armes modernes commencent à arriver mais les munitions continuent de manquer cruellement. Si l'Union européenne met les bouchées doubles et va essayer d'accélérer ses livraisons en procédant à des commandes massives, elle peine à répondre à des besoins pourtant immédiats.

Surtout, en prenant l'exemple de la 46e brigade aéromobile, un bataillon de 500 hommes dont la quasi-intégralité des membres originels ont été tués ou blessés au combat, le «WaPo» explique que Kiev perd ces jours-ci un nombre important de soldats très bien entraînés.

Comme du côté russe, il pourrait être compliqué pour l'Ukraine de remplacer dans les prochains mois ces hommes de grande expérience, et le quotidien américain parle d'un début de «pessimisme» qui monterait dans les rangs en jaune et bleu.

Certains analystes occidentaux expliquent pourtant que l'offensive russe hivernale est déjà embourbée, et qu'elle n'ira pas plus loin. Pessimisme ou pas, le plus dur est donc peut-être passé pour Kiev –attendre son heure, et tenir jusqu'à l'arrivée massive des armes occidentales.

En outre, l'Ukraine a peut-être au passage réussi à se débarrasser de Wagner et de ses vagues ininterrompues de soldats morts-vivants: si elle n'a pas trop entamé ses réserves, son rebond pourrait –dans les prochaines semaines ou prochains mois– être d'une grande puissance.

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